"Notre comité de lecture a attentivement examiné votre manuscrit. Malheureusement, il n'entre pas dans le cadre de notre politique éditoriale actuelle."
Six mois après l'envoi de votre oeuvre magistrale, voilà que tous les espoirs s'effondrent. La maison d'édition x ou y ne veut pas de votre prose. Enfer et damnation!
Ne vous suicidez pas directement: lisez d'abord mes quelques conseils sur la gestion d'un refus.
D'abord, il faut éviter de tomber dans la déprime. Evidemment, c'est un coup dur, une effroyable sensation de faiblesse vous envahit, vous vous sentez médiocre, raté, fini. Lessivé. Mais sachez une chose: un refus ne veut rien dire!
Même Proust a dû s'y prendre à plusieurs reprises pour faire publier sa Recherche du Temps Perdu.
Premièrement, un refus ne vous vise pas, vous, en tant que personne, mais vise votre oeuvre, en tant que production littéraire. Un peu de détachement ne peut donc pas faire de tort. Une fois que vous jetez votre manuscrit en pâture aux comités de lecture, c'est comme si vous abandonniez votre propre enfant. Sa mise à mort ne doit plus vous émouvoir. Vous devez couper toute relation sentimentale avec votre oeuvre dés que celle-ci est achevée. Son sort ne vous regarde plus.
Deuxièmement, un refus n'est pas synonyme de médiocrité esthétique. Bien sûr, dans la majorité des cas, des apprentis-auteurs envoient leut manuscrit trop tôt, avant même de s'être assurés de sa qualité. Mais si l'oeuvre est mûre, bien écrite, des raisons plus profondes peuvent pousser le comité de lecture à la rejeter. Il ne faut pas perdre de vue que le monde de l'édition est un business comme un autre. Si votre roman n'a pas une vocation commerciale, elle peut passer à la trappe plus facilement.
Attention, toutefois, à ne pas tomber dans le complexe de l'artiste incompris: votre oeuvre ignorée à cause du grand capitalisme, un comité de lecture trop ignorant pour comprendre votre art avant-gardiste, etc. N'y pensez même pas! Ces gens sont bien payés et compétents. Ils savent que s'ils manquent un chef-d'oeuvre, ils font un cadeau à la concurrence.
Votre manuscrit a donc été refusé pour une très bonne raison. La remise en question, c'est sur vous-même qu'il faut la faire. Avez-vous bien ciblé la maison d'édition? Avez-vous éliminé toutes les fautes d'orthographe, de grammaire, de style, toutes les tournures lourdes, maladroites, erronées, toutes les erreurs factuelles, les incohérences, et toutes ce qui ne convient pas?
Votre roman raconte-t-il quelque chose d'intéressant? Avez-vous évité les clichés? Vous démarquez-vous de la "foule"?
N'oubliez pas que les comités de lecture sont assaillis par les apprentis-auteurs comme vous. Vous devez vous livrer à un concours sans merci avec des centaines d'autres candidats. Il faut être le meilleur.
Une fois que vous avez répondu à toutes ces questions, que votre manuscrit vous paraît approprié, alors il est peut-être temps de tenter votre chance avec une autre maison d'édition.
En cas d'échec répété, il est conseillé d'abandonner et de se lancer dans l'écriture d'un nouveau roman.
1 commentaire:
Eh bien moi, j'ai une aventure peu commune à raconter.
En 2007, j'ai envoyé un manuscrit au comité de lecture de nombreuses maisons d'édition.
Je n'ai reçu que des refus ; un certain nombre d'éditeurs n'ont tout simplement pas répondu à cet envoi, parmi lesquels “Les Éditions du Bord-de-l'Eau”, sises dans le sud-ouest de la France.
Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, quelque temps après, sur le blog de cet éditeur, un éloge de mon manuscrit par le directeur de cette maison, M. Dominique-Emmanuel Blanchard :
« J’ai noté que ça arrivait souvent comme ça : après des semaines d’indigences littéraires surgissent, deux, trois manuscrits qui m’enchantent.
Hier c’était “Malateste”, aujourd’hui c’est “Apostrophe aux contemporains de ma mort”.
Que l’on ne s’y trompe pas : il s’agit d’une œuvre réjouissante malgré son titre. À commencer par son style.
L’ai-je assez déplorée cette pauvreté du style dans ce qui tombe dans la boîte postale et sur les messageries de BDL !
Et voilà que coup sur coup le style renaît, ne cesse de renaître de ses cendres (je vous épargnerai le cliché du Phénix, enfin, presque).
Voulez-vous un exemple de ce fameux style dont il m’arrive de rebattre les oreilles des incrédules ? Oui, n’est-ce pas ?
Voici donc :
“Ensuite je ne sais plus, j’ai un trou de mémoire. Je crois que les événements se sont précipités. Qu’on sache seulement que d’assis je me suis retrouvé couché sur le dos, qu’il n’était plus à côté de moi, mais sur moi, et que de paroles entre nous il ne pouvait être question, car il s’affairait à rendre la chose impossible à lui comme à moi.” »
http://domi33.blogs.sudouest.com/archive/2007/12/20/deb-le-style-bordel.html
Je n'ai jamais eu de nouvelles de cet éditeur. (Heureusement j'ai trouvé il y a peu un autre éditeur).
Enregistrer un commentaire