Les journaux sont remplis de ce genre d'histoires à dormir debout. Petit extrait typique: "Le film Séraphine, qui a raflé sept prix à la dernière cérémonie des Césars a été assigné en contrefaçon. Alain Vircondelet, historien d'art, spécialiste reconnu de Séraphine Louis, accuse les auteurs d'avoir plagié un de ses ouvrages. Il a publié chez Albin Michel une biographie intitulée Séraphine de Senlis, un ouvrage qui selon son avocat, Me Christophe Bigot, révélait pour la première fois la vie publique et secrète de Séraphine de Senlis."
Ou encore: "Hollywood s'est bien gardé de révéler que derrière les succès planétaires des productions The Matrix et Terminator se trouve une femme noire. Cette africaine-américaine presque anonyme se nomme Sophia Stewart. On croit rêver! La raison de cet anonymat déplacé ou pour le moins mal placé ? Les scénaristes et les majors responsables de ces blockbusters mondiaux ont tout simplement oublié de créditer Sophia Stewart comme auteur des scenarii qui ont inspiré lesdits films."
Inutile de préciser qu'à chaque fois les plaignants sont déboutés. Et c'est bien normal: en général, les ressemblances entre les films diffusés et les scénarios des plaignants se limitent à quelques vagues séquences, à des thématiques globales, mais rarement à des points très précis. Or, pour qu'il y ait plagiat, il faut que le juge soit à même de constater la contrefaçon sur base d'éléments tangibles.
Pourquoi je vous parle de tout ça?
Parce que, venant du camps des sceptiques, je vois mes convictions vaciller face à une affaire de plagiat... qui me concerne! Plus précisément, après avoir vu la bande-annonce du film "Moon" de Duncan Jones (http://www.imdb.com/title/tt1182345), j'ai une impression de déjà vu! Et c'est très désagréable, parce que j'ai déjà vu tout ça dans un scénario que j'ai écrit... en 2005.
Le titre était "La dernière guerre". Le pitch? Un astronaute doit gérer seul, depuis des années, dans une solitude qui le ronge, une station orbitale autour de Mars (okay, c'est pas la lune). Il est accompagné par un robot qui communique via des smileys (comme dans le film). Bien sûr, il apprend la mort d'un proche par écran interposé longtemps après la mort de celui-ci.... comme dans le film! Et à la fin, il est question du clonage de l'astronaute. Comme dans le film! Argh!
Pour la première fois de ma vie, j'ai eu une impulsion paranoïaque! Je n'ai pas encore vu le film, mais seulement des extraits, sur internet. J'ai l'impression de voir la version filmée de mon scénario.
Evidemment, en rationalisant un peu, on se rend compte que la probabilité de plagiat véritable est quasi nulle: j'ai écrit en français, le scénariste du film est anglais. Il y a des parts entières du film que je n'aborde pas dans mon scénario (déjà, la lune). Et puis rajouter des clones dans le lot, c'est un thème à la mode qui ne m'appartient pas, on peut le classer dans la catégorie des coïncidences. Reste tout de même l'idée *bonne, apparemment* de faire un robot qui communique avec des smileys (jetez un coup d'oeil à la bande-annonce du film, vous comprendrez) qui est tout de même très précise, et surtout décrite de manière totalement identique dans mon scénario.
Est-ce que ça vaut un procès? Probablement pas. Est-ce que Duncan Jones est un vilain copieur? Certainement pas. Est-ce que j'ai été floué d'une manière ou d'une autre? Non plus.
Pas de victime, pas de dommage, pas de criminel... pas de plagiat.
Il me reste au moins l'illusion que mon scénario *aurait pu* donner un bon film. Les premières critiques sont élogieuses pour Moon. Il va bien falloir que j'aille le voir...
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