01 mars 2011

Community, la méta-série

Je poursuis mon exploration des sitcoms. Community n'est pas aussi connue que les autres séries que j'ai analysées, mais elle mérite franchement d'être découverte. Elle est plus subtile, cultivée et imprévisible que la moyenne des autres sitcoms. Il y a plusieurs raisons à cela.

La galerie de faux clichés
Community, c'est l'histoire de Jeff, un ex-avocat forcé de retourner sur les bancs de l'école pour obtenir un diplôme valable. Il crée un groupe d'étude dans le but de draguer Britta, mais il y restera finalement pour les autres, qui deviennent rapidement ses amis... Et qui sont un rêve pour les amateurs de diversité: 2 noirs, 2 blancs, 2 juifs, 1 arabe et 1 asiatique.

Dés le pilote, le ton est donné: Abed, un des personnages, déclare que ce groupe d'étude est un remake du Breakfast Club, de John Hughes. On est directement dans les références pop des années 80, et ça n'arrêtera plus. C'est également un "mission statement" de la part des auteurs: les personnages ressemblent à des clichés, mais ne sont pas des clichés. Comme dans Breakfast Club, il faudra creuser un peu plus loin pour découvrir le véritable visage de nos héros.

Abed, par exemple, est victime du syndrome d'Asperger (façon Sheldon Cooper). Mais en réalité, tout au long de la série, il fait preuve de plus d'humanité que le reste du groupe.

Britta se déclare athée révolutionnaire et généreuse, elle est en fait engoncée dans ses croyances, son petit confort et ses habitudes.

Troy, le black sportif, est beau, musclé, dragueur... mais désespérément geek.

J'arrête là le tableau, mais tout ce petit monde est extrêmement vivant. Le tout est géré avec beaucoup de fluidité de la part des auteurs, on ne fait pas face à des personnages en carton. Parfois, cela se fait au détriment de l'humour: comme dans beaucoup de série "monocaméra" qui jouent sur la subtilité, on en oublie d'être drôle. Le bon côté de la médaille, c'est que lorsque le rire arrive, il est sincère et vraiment bon.

Un méta-humour
Une rapide comparaison entre les gags de "Big Bang Theory" et autres "How I Met Your Mother" avec ceux de "Community", nous en convaincra. Là où les séries "multi-caméra" avec rires pré-enregistrés se basent sur un schéma de gag classique, avec le temps fort sur la chute, Community se permet de détourner cette construction habituelle. Puisqu'elle n'a pas besoin de déclencher les rires dans un public en direct, elle peut se baser sur des "trucs" cinématographiques (montage, bruitage, etc.) pour faire passer discrètement le rire entre deux phrases. Ici, la chute est le temps faible de la phrase.

Regardez cet extrait par exemple: http://www.youtube.com/watch?v=iE8meUf0qCM

Si l'on n'est pas attentif, on ne se marre pas souvent. J'avais lu une critique assassine de l'épisode pilote (sur LeBlogTVNews), qui est passée complètement à côté de l'humour spécifique de Community (ne retenant que l'évident et grossier "Ass-Berger"). Mais c'est passer à côté des références culturelles: Ben Affleck, Breakfast Club, Bill Murray. Sans avoir l'air d'y toucher, les fameux 13 rires à la minutes sont presque atteints.

Ce que l'on appelle le méta-humour, c'est lorsque les personnages se moquent de leur condition de personnages de série télé. On brise le 4ème mur. C'est monnaie courante dans Community. Normalement, c'est le genre d'humour que l'on évite, car ça éloigne le spectateur de l'intrigue. Mais dans Community, le surréalisme et les références à la télé font partie de l'univers. Elle sont plus facilement assimilées grâce au personnage d'Abed qui, à moitié fou, vit dans un monde fait de séries télé. Ceci dit, cela n’empêche pas les autres de sortir du cadre strict de leur personnage de temps à autre.

Le surréalisme
Au fil de la série, une touche surréaliste est venue se greffer à la série. Ca m'a fait pensé à Parker Lewis Ne Perd Jamais. C'est plutôt bon signe (j'ai grandi dans les années 90!)... Ce surréalisme assumé est d'autant plus bienvenu qu'il n'est pas excuse à des facilités de gags foireux. En réalité, il est très ambitieux. Les meilleurs épisodes sont les plus surréalistes, car ils sont teintés d'une "aura cinématographique" rarement vue en sitcom. Il y a par exemple eu un épisode spécial Noël entièrement en animation plasticine!

Un autre héritage du passé, emprunté notamment à Arrested Development (même producteur), c'est la persistance des gags d'un épisode à l'autre. On ne fait pas table rase du passé chaque semaine, et on traîne les vieux boulets avec soi jusqu'au bout. C'est la recette qui avait permis à Arrested Development de créer cet humour exponentiel, et cela fonctionne de la même manière ici. D'ailleurs, la qualité de la série monte au fil des épisodes.

Faut-il craindre une annulation précoce de la série, destin tragique de toutes les sitcoms qui visent un peu plus haut que d'habitude? Non, je ne le pense pas, car elle parvient à capter son public! Je vous conseille donc de découvrir Community, et de voir jusqu'où le format sitcom peut aller de nos jours!

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