Un moment où un autre dans sa carrière, un scénariste doit répondre à la commande d'un producteur. Peut-être est-il amené à développer un pitch qu'il a lui-même imaginé, ou à adapter une oeuvre antérieure, mais le plus souvent l'idée de départ vient du producteur.
Et donc, le scénariste, tout heureux d'être enfin investi d'une réelle mission d'écriture, doit écrire un synopsis ou un bout d'essai en quelques jours sur la base d'un petit cahier des charges de deux ou trois pages (parfois ce "cahier des charges" se limite à une conversation téléphonique), et convaincre le producteur de lui faire confiance pour la suite du projet.
Le principal problème, ce n'est pas de développer une histoire (ça c'est facile), mais plutôt d'imaginer le genre de produit qui serait dans les cordes du producteur. En effet, lorsqu'il nous demande d'écrire un bout d'essai, le producteur veut surtout voir à quoi ressemble notre écriture, notre façon de traiter un sujet, et si notre travail correspond au gout de la maison.
Et là, bonjour le jeu des devinettes.
Alors, bien entendu, pour baliser le terrain, le scénariste pose quelques questions sur la tonalité de la série, sur les autres films ou séries qui s'en rapprochent, éventuellement sur les acteurs pressentis, etc. Mais même un interrogatoire exhaustif ne suffit pas à réellement cerner les attentes réelles du producteurs. Qu'a-t-il produit avant? Quel est le style maison? Quelle est la chaîne visée? Quel créneau horaire? Quel budget? Ces questions, utiles, ne vous donneront qu'un aperçu très vague de ce que l'on attend de vous.
Il y a une bonne raison à cela: si le producteur fait appel à un scénariste, c'est parce qu'il n'est pas totalement sûr lui-même du résultat qu'il désire obtenir. Il espère que votre génie créatif comblera toutes ses espérances, éclairera tous ses doutes, et répondra à toutes ses interrogations.
Le problème, c'est que sur base d'un tout petit pitch et d'un tout petit cahier des charges, mille scénaristes écriront mille scénarios complètement différents. Et tous ne parleront pas forcément au producteur. Mais difficile de deviner lesquels. D'où le jeu des devinettes.
Faut-il la jouer classique? Expérimental? Osé ou policé? Jusqu'où aller dans l'humour? Dans le trash? L'humour prend quelle place par rapport au drame? Le drame est-il larmoyant ou en retenue?
Autant de choix créatifs qui vont donner une direction différente à votre bout d'essai... Des choix qui vont vous définir aux yeux du producteur en tant que scénariste.
Donc, les devinettes, c'est bien, mais ne vous perdez pas trop en court de route. En fin de compte, c'est vous que vous vendez. Le bout d'essai n'est qu'une carte de visite. Si, à force de devinette, vous écrivez quelque chose qui est à l'opposé de vos sensibilités, le reste de la collaboration sera douloureux.
On dirait un vieux conseil de drague: soyez vous-même. Mais c'est vrai... La bonne version de vous-même, en tout cas.
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