Philippe Blasband est probablement le scénariste belge le plus prolifique: auteur de Thomas Est Amoureux, La Femme De Gilles, Un honnête Commerçant, Une Liaison Pornographique, Le Tango Des Rashevski, et j'en passe, il a gentiment accepté de répondre à mes quelques questions.
Comment vous est venue la passion de l'écriture?
Philippe Blasband: Cela s'est passé de façon compliquée, entre plusieurs écoles de cinéma, plusieurs envies, plusieurs rencontres, etc. Le montage est une excellente formation, tant pour le scénario que pour la réalisation. Cela me semblait une bonne idée de débuter comme monteur. Et, en fait, j'adore le montage. Le montage, c'est à peu près le même travail que le scénario, à ce détail près: l'un est avant le tournage, l'autre après. Mais en Belgique, il y a beaucoup de monteurs, de très bons monteurs, et très peu de scénaristes. Et j'ai toujours écrit. Il y avait donc une place à prendre.
Plus jeune, vous avez toujours voulu devenir cinéaste?
Philippe Blasband : Oui. C'était ou bien le cinéma, ou bien la légion étrangère. Ou gigolo.
Quelle est votre méthode de travail?
Philippe Blasband: Cela dépend beaucoup du contexte, du type de scénario, des contraintes extérieures, de mes envies, etc. Je m'adapte. La méthode est différente si le scénario est une adaptation ou pas, si les producteurs me pressent ou pas. J'ai parfois terminé des scénarios en deux trois semaines (la Femme de Gilles), ou en cinq, six versions (une Liaison Pornographique), mais j'ai aussi traîné des scénarios pendant huit ans (Un honnête commerçant) et fait une cinquantaine de version, en recommençant plusieurs fois depuis le début (J'ai toujours voulu être une Sainte). Deux constantes néanmoins: j'écris toujours plusieurs scénarios à la fois. Et j'ai tendance, depuis un an, par commencer par écrire un traitement.
"Thomas est amoureux" est un film atypique qui s'est beaucoup fait remarquer pour son parti pris. Vous en aviez conscience en l'écrivant?
Philippe Blasband: Ce film n'a pas eu tellement de succès que cela. Mais je dois bien avouer qu'à part "la Couleur des mots", j'ai toujours voulu que les films dont j'écrivais le scénario ait la Palme d'or. Jusqu'à maintenant, j'ai toujours été très légèrement déçu. Plus sérieusement, j'espérais que ce soit un film particulier, un prototype. C'est la seule chance d'exister pour un film belge.
Pour un scénariste professionnel comme vous, comment s'organise une journée de travail?
Philippe Blasband: J'ai deux enfants, un chien, une femme comédienne, des obligations diverses: je serais incapable d'organiser ma journée. J'écris dès que j'ai le temps. Même si j'ai cinq minutes, j'écris ou je corrige. J'en ai développé une certaine tendance maladive à la graphomanie.
30 octobre 2006
27 octobre 2006
Les logiciels d'écriture
L'époque est au tout technologique. Les scénaristes n'y échappent pas. Les éditeurs de logiciels l'ont bien compris: l'écriture de scénarios est un marché juteux, vu le nombre toujours croissant d'apprentis en quête de gloire.
L'offre de logiciels d'écriture est vraiment très étoffée. On se pose la question: pour écrire un scénario, le bon vieux traitement de texte ne suffit-il pas? Si l'on en croit les publicités, ces logiciels sont indispensables et la vie d'écrivain serait infernale sans eux. Leur tâche principale est simple: respecter la mise en page traditionnelle des scénarios.
Une mise en page un peu difficile à mettre en place dans un traitement de texte généraliste (quoiqu'en bidouillant un peu, c'est tout à fait possible pour pas un rond). En outre, certains logiciels ont des fonctions de numérotations spécifiques, de post-it, de statistiques et tout un tas d'autres gadgets plus ou moins inutiles.
En plus des logiciels de mise en page, il existe des logiciels d'aide au développement d'un récit: création des personnages, de l'intrigue, etc. Mais là, ne comptez pas sur moi pour en faire le publicité, je ne crois pas aux miracles. Une histoire n'est pas le résultat de quelques variables électroniques, mais de tout un processus mûrement réfléchi. Ne vous ruez pas sur ces attrape-nigauds à la moindre panne d'inspiration.
Faisons donc un petit tour des logiciels de mise en page:
Final Draft - probablement le plus connu, il est également le plus cher.
Son utilisation est la plus confortable de tous. Ce logiciel est vraiment conçu pour les scénaristes, pas pour les informaticiens. Le nombre de menus est relativement limité, et tant mieux: on ne perd pas de temps à configurer l'ensemble et l'on peut se concentrer sur l'écriture. Parmi les côtés négatifs, la gestion des noms de personnages n'est pas assez poussée: si l'on décide de changer un nom en plein milieu d'un scénario, il faut tout changer à la main. Mais globalement, c'est le logiciel que j'utilise depuis toujours. Il me convient parfaitement, même si son prix est honteusement surévalué par rapport à ses fonctions réelles. Avec le recul, une solution moins onéreuse me semble mieux indiquée.
Informations sur http://www.finaldraft.com.
Celtx - un petit nouveau, il est très intéressant puisqu'il est gratuit.
Celtx n'existait pas encore lorsque je me suis procuré Final Draft, mais j'ai eu l'occasion de tester ce logiciel entre temps et il m'a agréablement surpris. D'une part parce qu'il est gratuit, ce qui est vraiment primordial, et d'autre part parce qu'il tient très bien la comparaison avec ses frères payants. Il souffre néanmoins de quelques défauts de jeunesse (notamment dans l'exportation PDF qui reste imparfaite) mais ceux-ci sont vite réglés car la communauté de développeurs open-source est très réactive. Un logiciel à considérer pour ceux qui n'ont pas envie de dépenser une fortune.
Téléchargez-le sur http://www.celtx.com.
Sophocles - un concurrent sérieux pour Final Draft, puisqu'il possède à peu près les mêmes caractéristiques mais qu'il côute deux fois moins cher!
Je l'ai testé quelques heures uniquement, mais il ne m'a pas emballé. Trop compliqué, trop brouillon, trop encombré de menus... Ce logiciel plaira probablement aux aficionados de la configuration personnalisée jusque dans les moindre détails, mais l'écriture semble un peu perdue au milieu de tout cela. Disons que son prix modéré joue en sa faveur.
Visitez http://www.sophocles.net.
Movie Magic Screenwriter - le même genre d'outsider que Sophocles: plein de fonctions plus ou moins utiles, et un prix moyen.
Ce logiciel possède les mêmes défauts que Sophocles: trop de menus et d'options, pas assez de clarté. En ouvrant ce logiciel, je n'avais même plus envie d'écrire. Je ne le conseille pas.
Présentation sur http://store.write-bros.com.
Les prix tournent autour de 250 euros pour Final Draft, 200 pour Movie Magic et 150 pour Sophocles. Celtx est gratuit (il se base sur Mozilla Firefox, gage de qualité).
Maintenant, dans ce supermarché du scénariste, il faut envisager les solutions "artisanales": bidouiller un traitement de texte généraliste (comme le gratuit Open Office). En réalité, tout l'art consiste à utiliser des macros qui rendent les tâches de mise en page (centrage des dialogues, taille des caractères, types de paragraphes) automatisées. En quelques minutes, il est possible de sauvegarder un "Document type", qui sera utile à chaque nouveau scénario.
La méthode pour transformer gratuitement Microsoft Word en "formateur" de scénario est décrire sur ce site: Scenariopole (rubrique Dossiers Pratiques > Feuilles de style). Sur Framasoft, les explications pour Open Office.
Mais l'important, dans ce lot de solutions payantes, gratuites ou artisanales, ce n'est pas tellement d'obtenir une mise en page "officielle". C'est d'automatiser une tâche répétitive pour se concentrer sur le principal : l'écriture!
L'offre de logiciels d'écriture est vraiment très étoffée. On se pose la question: pour écrire un scénario, le bon vieux traitement de texte ne suffit-il pas? Si l'on en croit les publicités, ces logiciels sont indispensables et la vie d'écrivain serait infernale sans eux. Leur tâche principale est simple: respecter la mise en page traditionnelle des scénarios.
Une mise en page un peu difficile à mettre en place dans un traitement de texte généraliste (quoiqu'en bidouillant un peu, c'est tout à fait possible pour pas un rond). En outre, certains logiciels ont des fonctions de numérotations spécifiques, de post-it, de statistiques et tout un tas d'autres gadgets plus ou moins inutiles.
En plus des logiciels de mise en page, il existe des logiciels d'aide au développement d'un récit: création des personnages, de l'intrigue, etc. Mais là, ne comptez pas sur moi pour en faire le publicité, je ne crois pas aux miracles. Une histoire n'est pas le résultat de quelques variables électroniques, mais de tout un processus mûrement réfléchi. Ne vous ruez pas sur ces attrape-nigauds à la moindre panne d'inspiration.
Faisons donc un petit tour des logiciels de mise en page:
Final Draft - probablement le plus connu, il est également le plus cher.
Son utilisation est la plus confortable de tous. Ce logiciel est vraiment conçu pour les scénaristes, pas pour les informaticiens. Le nombre de menus est relativement limité, et tant mieux: on ne perd pas de temps à configurer l'ensemble et l'on peut se concentrer sur l'écriture. Parmi les côtés négatifs, la gestion des noms de personnages n'est pas assez poussée: si l'on décide de changer un nom en plein milieu d'un scénario, il faut tout changer à la main. Mais globalement, c'est le logiciel que j'utilise depuis toujours. Il me convient parfaitement, même si son prix est honteusement surévalué par rapport à ses fonctions réelles. Avec le recul, une solution moins onéreuse me semble mieux indiquée.
Informations sur http://www.finaldraft.com.
Celtx - un petit nouveau, il est très intéressant puisqu'il est gratuit.
Celtx n'existait pas encore lorsque je me suis procuré Final Draft, mais j'ai eu l'occasion de tester ce logiciel entre temps et il m'a agréablement surpris. D'une part parce qu'il est gratuit, ce qui est vraiment primordial, et d'autre part parce qu'il tient très bien la comparaison avec ses frères payants. Il souffre néanmoins de quelques défauts de jeunesse (notamment dans l'exportation PDF qui reste imparfaite) mais ceux-ci sont vite réglés car la communauté de développeurs open-source est très réactive. Un logiciel à considérer pour ceux qui n'ont pas envie de dépenser une fortune.
Téléchargez-le sur http://www.celtx.com.
Sophocles - un concurrent sérieux pour Final Draft, puisqu'il possède à peu près les mêmes caractéristiques mais qu'il côute deux fois moins cher!
Je l'ai testé quelques heures uniquement, mais il ne m'a pas emballé. Trop compliqué, trop brouillon, trop encombré de menus... Ce logiciel plaira probablement aux aficionados de la configuration personnalisée jusque dans les moindre détails, mais l'écriture semble un peu perdue au milieu de tout cela. Disons que son prix modéré joue en sa faveur.
Visitez http://www.sophocles.net.
Movie Magic Screenwriter - le même genre d'outsider que Sophocles: plein de fonctions plus ou moins utiles, et un prix moyen.
Ce logiciel possède les mêmes défauts que Sophocles: trop de menus et d'options, pas assez de clarté. En ouvrant ce logiciel, je n'avais même plus envie d'écrire. Je ne le conseille pas.
Présentation sur http://store.write-bros.com.
Les prix tournent autour de 250 euros pour Final Draft, 200 pour Movie Magic et 150 pour Sophocles. Celtx est gratuit (il se base sur Mozilla Firefox, gage de qualité).
Maintenant, dans ce supermarché du scénariste, il faut envisager les solutions "artisanales": bidouiller un traitement de texte généraliste (comme le gratuit Open Office). En réalité, tout l'art consiste à utiliser des macros qui rendent les tâches de mise en page (centrage des dialogues, taille des caractères, types de paragraphes) automatisées. En quelques minutes, il est possible de sauvegarder un "Document type", qui sera utile à chaque nouveau scénario.
La méthode pour transformer gratuitement Microsoft Word en "formateur" de scénario est décrire sur ce site: Scenariopole (rubrique Dossiers Pratiques > Feuilles de style). Sur Framasoft, les explications pour Open Office.
Mais l'important, dans ce lot de solutions payantes, gratuites ou artisanales, ce n'est pas tellement d'obtenir une mise en page "officielle". C'est d'automatiser une tâche répétitive pour se concentrer sur le principal : l'écriture!
25 octobre 2006
Vendre un scenario
Généralement, après quelques mois de tâtonnements, le novice n'a plus qu'une idée en tête: vendre son scénario! Après tout, il s'est tué à la tâche pour pondre un chef-d'œuvre digne des plus grands... Y'a pas de raison de ne pas en tirer profit!
Cette attitude très naïve est plutôt positive, à mon sens. Elle démontre une véritable volonté de se confronter au monde réel et d'avoir un feedback sur ses créations. Bien sûr, les puristes rétorqueront que déjà les bas instincts commerciaux prennent le dessus par rapport à la création et à l'art.
Certes, vouloir vendre un scénario trois mois à peine après avoir découvert Syd Field est un peu précipité. Mais je trouve préférable de voir un jeune auteur ambitieux faire lire ses scénarios à quelqu'un plutôt qu'un génie introverti qui n'écrit que pour lui-même.
Le novice enverra donc un courrier poli à la première boite de production venue... Pour les prunes. Deux attitudes s'offrent alors à lui: critiquer le refus ("tous des pistonnés") et se murer dans une parano contreproductive, ou alors essayer de décortiquer les raisons de cet échec.
Passé ce cap, la deuxième tentative de "confrontation au monde réel" est généralement plus sage et réfléchie... D'ailleurs bien souvent des années passent avant que le novice ne retente sa chance. Et là aussi, c'est tant mieux: il a eu le temps de prendre un peu de bouteille, de découvrir Lavandier et McKee (et L'Auteur Inspiré bien sûr!), son écriture s'est affirmée.
Et il sait que l'on n'envoie pas un scénario au hasard: le cinéma n'est pas une loterie mais un business organisé rationnellement. Chaque producteur a sa spécialité, son créneau, son budget! Cibler le producteur, c'est 25% de la réussite.
50% relèvent de la qualité intrinsèque du scénario. Lors d'un refus, la responsabilité du scénariste est donc prépondérante: pas question de rejeter la faute sur "ce producteur véreux", "ces gens sans goût" et "tous ces pistonnés qui ne travaillent qu'entre eux".
La 25% qui restent, c'est la chance d'être au bon endroit au bon moment: convenir à un créneau qui enthousiasme le producteur à un moment x, selon des facteurs tellement variés et incontrôlables que nous les regrouperont sous le vocable de "chance".
Une fois habitué des refus de producteur, mais zen et consciencieux, le novice entre dans la catégorie des "pré-pros". C'est à dire qu'il n'a toujours rien vendu, qu'il a beaucoup écrit, et qu'il va finir par tomber en grave dépression nerveuse si rien ne change très rapidement.
C'est un pro en devenir. Là, ses chances de vendre un scénario augmentent statistiquement avec le nombre de scénarios qu'il écrit. A Hollywood, on a coutume de dire qu'après 10 longs-métrages bien ficelés (à l'exclusion des bouts d'essais pas achevés ou mal torchés), dûment envoyés à des producteurs bien ciblés, une vente devient imminente.
Vendre son scénario est donc une affaire d'acharnement avant tout. Malgré les critiques difficiles à encaisser au début, il ne faut pas se laisser abattre. Il faut prendre en considération, sans devenir une girouette pour autant, les commentaires des lecteurs. Retirer le meilleur du feedback et enrichir sans cesse son écriture.
Statistiquement, y'a pas de raison que ça ne marche pas...
Bien sûr, si la loi des grands nombres joue en notre faveur, il ne faut pas pour autant mépriser l'effort et le travail. Une lettre de refus est synonyme de pain sur la planche. Voici quelques conseils pour améliorer votre scénario:
5 CONSEILS POUR ECRIRE UN BON SCENARIO
1. Créer des personnages attachants
Ce sont vos personnages qui invitent les spectateur à se plonger dans l'histoire, ils ont donc tout intérêt à susciter l'empathie. La recette pour un bon personnage dans mon article "Comment créer un personnage".
2. Trouver un style
Pour vous démarquer des autres scénaristes, essayez de trouver une façon de raconter les histoires tout personnelle. Imaginez la façon dont Spielberg traite de la Shoah, par exemple, et comparez-le à Claude Lanzmann. C'est le jour et la nuit, et pourtant l'histoire est la même! Chaque auteur doit se différencier, et trouver sa voix.
3. Soigner les dialogues
De tout votre scénario, les dialogues sont les éléments les plus évidents (certains s'imaginent même qu'un scénario n'est constitué QUE de dialogues!), mais aussi les plus difficiles à écrire. Pour éviter les fautes de goût, il faudra écrire des dialogues qui sonnent juste, qui ne sont pas trop longs, qui ne s'égarent pas, bref: c'est une tâche ardue. Je vous conseille de faire un tour sur mon article "comment écrire un bon dialogue" pour en savoir plus.
4. Eviter les clichés
Les clichés sont ces petits moments dans un film où le spectateur pense "ah! j'ai déjà vu ça quelque part", et ce n'est pas une bonne chose! Soyez originaux! Voici quelques trucs et astuces pour éviter les clichés dans votre scénario.
5. Utiliser le set-up et le payoff
Le truc du set-up/pay-off consiste à utiliser un élément (un dialogue, un objet, ...) longtemps après l'avoir mentionné dans le scénario. Pensez à la luge avec l'inscription "Rosebud" dans Citizen Kane: Orson Welles l'installe (set-up) au début du film mais ne l'utilise réellement qu'à la toute fin (pay-off). C'est un truc de scénariste qui fait mouche à chaque fois! Apprenez comment vous en servir dans mon article "set up et pay off".
Cette attitude très naïve est plutôt positive, à mon sens. Elle démontre une véritable volonté de se confronter au monde réel et d'avoir un feedback sur ses créations. Bien sûr, les puristes rétorqueront que déjà les bas instincts commerciaux prennent le dessus par rapport à la création et à l'art.
Certes, vouloir vendre un scénario trois mois à peine après avoir découvert Syd Field est un peu précipité. Mais je trouve préférable de voir un jeune auteur ambitieux faire lire ses scénarios à quelqu'un plutôt qu'un génie introverti qui n'écrit que pour lui-même.
Le novice enverra donc un courrier poli à la première boite de production venue... Pour les prunes. Deux attitudes s'offrent alors à lui: critiquer le refus ("tous des pistonnés") et se murer dans une parano contreproductive, ou alors essayer de décortiquer les raisons de cet échec.
Passé ce cap, la deuxième tentative de "confrontation au monde réel" est généralement plus sage et réfléchie... D'ailleurs bien souvent des années passent avant que le novice ne retente sa chance. Et là aussi, c'est tant mieux: il a eu le temps de prendre un peu de bouteille, de découvrir Lavandier et McKee (et L'Auteur Inspiré bien sûr!), son écriture s'est affirmée.
Et il sait que l'on n'envoie pas un scénario au hasard: le cinéma n'est pas une loterie mais un business organisé rationnellement. Chaque producteur a sa spécialité, son créneau, son budget! Cibler le producteur, c'est 25% de la réussite.
50% relèvent de la qualité intrinsèque du scénario. Lors d'un refus, la responsabilité du scénariste est donc prépondérante: pas question de rejeter la faute sur "ce producteur véreux", "ces gens sans goût" et "tous ces pistonnés qui ne travaillent qu'entre eux".
La 25% qui restent, c'est la chance d'être au bon endroit au bon moment: convenir à un créneau qui enthousiasme le producteur à un moment x, selon des facteurs tellement variés et incontrôlables que nous les regrouperont sous le vocable de "chance".
Une fois habitué des refus de producteur, mais zen et consciencieux, le novice entre dans la catégorie des "pré-pros". C'est à dire qu'il n'a toujours rien vendu, qu'il a beaucoup écrit, et qu'il va finir par tomber en grave dépression nerveuse si rien ne change très rapidement.
C'est un pro en devenir. Là, ses chances de vendre un scénario augmentent statistiquement avec le nombre de scénarios qu'il écrit. A Hollywood, on a coutume de dire qu'après 10 longs-métrages bien ficelés (à l'exclusion des bouts d'essais pas achevés ou mal torchés), dûment envoyés à des producteurs bien ciblés, une vente devient imminente.
Vendre son scénario est donc une affaire d'acharnement avant tout. Malgré les critiques difficiles à encaisser au début, il ne faut pas se laisser abattre. Il faut prendre en considération, sans devenir une girouette pour autant, les commentaires des lecteurs. Retirer le meilleur du feedback et enrichir sans cesse son écriture.
Statistiquement, y'a pas de raison que ça ne marche pas...
Bien sûr, si la loi des grands nombres joue en notre faveur, il ne faut pas pour autant mépriser l'effort et le travail. Une lettre de refus est synonyme de pain sur la planche. Voici quelques conseils pour améliorer votre scénario:
5 CONSEILS POUR ECRIRE UN BON SCENARIO
1. Créer des personnages attachants
Ce sont vos personnages qui invitent les spectateur à se plonger dans l'histoire, ils ont donc tout intérêt à susciter l'empathie. La recette pour un bon personnage dans mon article "Comment créer un personnage".
2. Trouver un style
Pour vous démarquer des autres scénaristes, essayez de trouver une façon de raconter les histoires tout personnelle. Imaginez la façon dont Spielberg traite de la Shoah, par exemple, et comparez-le à Claude Lanzmann. C'est le jour et la nuit, et pourtant l'histoire est la même! Chaque auteur doit se différencier, et trouver sa voix.
3. Soigner les dialogues
De tout votre scénario, les dialogues sont les éléments les plus évidents (certains s'imaginent même qu'un scénario n'est constitué QUE de dialogues!), mais aussi les plus difficiles à écrire. Pour éviter les fautes de goût, il faudra écrire des dialogues qui sonnent juste, qui ne sont pas trop longs, qui ne s'égarent pas, bref: c'est une tâche ardue. Je vous conseille de faire un tour sur mon article "comment écrire un bon dialogue" pour en savoir plus.
4. Eviter les clichés
Les clichés sont ces petits moments dans un film où le spectateur pense "ah! j'ai déjà vu ça quelque part", et ce n'est pas une bonne chose! Soyez originaux! Voici quelques trucs et astuces pour éviter les clichés dans votre scénario.
5. Utiliser le set-up et le payoff
Le truc du set-up/pay-off consiste à utiliser un élément (un dialogue, un objet, ...) longtemps après l'avoir mentionné dans le scénario. Pensez à la luge avec l'inscription "Rosebud" dans Citizen Kane: Orson Welles l'installe (set-up) au début du film mais ne l'utilise réellement qu'à la toute fin (pay-off). C'est un truc de scénariste qui fait mouche à chaque fois! Apprenez comment vous en servir dans mon article "set up et pay off".
24 octobre 2006
Citation
"L'art du cinéma consiste à s'approcher de la vérité des hommes, et non pas à raconter des histoires de plus en plus surprenantes."
-- Jean Renoir
-- Jean Renoir
23 octobre 2006
A nos actes manqués
En relisant les anciens articles, je me suis rendu compte que je n'ai jamais vraiment parlé des fondamentaux, notamment de la structure en trois actes.
Je vais donc vous exposer ma vision de cette stupidité théorique. Accrochez-vous: on a coutume de découper un scénario en trois grands actes: l'acte 1 (début), l'acte 2 (milieu), l'acte 3 (fin). Voilà, c'est tout. Mirobolant, n'est-ce pas?
Bon, j'avoue: j'exagère un tout petit peu. La vraie théorie décortique un peu plus le récit:
- l'acte 1 contient une exposition, dans laquelle on présente les personnages et la situation initiale.
- l'acte 1 se termine par un évènement déclencheur qui lance l'histoire sans retour arrière possible.
- l'acte 2 se divise en deux partie: la première montre une montée en puissance des forces mises en jeu, la deuxième montre la descente aux enfers du protagoniste.
- l'acte 2 se termine par le combat final.
- l'acte 3 montre la résolution du conflit.
C'est d'une simplicité et d'une évidence tellement instinctive que je ne comprends pas comment des auteurs peuvent s'étendre 200 pages sur le sujet. Ceci explique donc pourquoi je n'en ai jamais parlé avant.
La vraie question, c'est: "est-il bon que les auteurs aient conscience de l'emplacement de leurs 3 actes dans leurs scénarios?"
Mais je réponds par la négative. En effet, "on" (de nombreux auteurs reconnus et moins reconnus) conseille aux novices de contrôler la longueur des actes qu'ils écrivent: pas plus de 30 pages pour l'acte 1, pas moins de 50 pages pour l'acte 2, l'acte trois étant le plus court sans exception. Les raisons de ce conseil empoisonné sont compréhensibles: les novices ont tendance à écrire une exposition interminable avec un récit qui ne décolle jamais, à ne pas assez approfondir les conflits qui restent à un niveau superficiel et se résolvent de manière assez simple en fin de compte.
Mais la notion d'actes a des effets pervers: il détourne l'attention des apprentis-scénaristes vers des choses superficielles et leur retire partiellement la responsabilité d'un bon contenu, au profit d'une bonne structure.
Puisque cette notion d'actes est à mon sens intuitive et évidente (a-t-on idée d'écrire quelque chose sans début, sans milieu et sans fin?), il vaut mieux se l'enlever de l'esprit et se concentrer sur ce qui compte réellement: construire le récit de sorte qu'il tienne la route sur la longueur sans traîner au début.
Le découpage en actes n'est d'aucune aide pour arriver à ce résultat. Le travail est plus profond, et plus difficile. L'auteur doit systématiquement se demander si chaque scène fait avancer le schmilblick de façon "plaisante", c'est-à-dire qu'il y a une valeur ajoutée à la simple exposition des faits.
Ensuite, le travail sur la structure peut-être totalement indépendant de la théorie des trois actes. Quelques règles empiriques peuvent être conseillées, car elles ont fait leurs preuves: aller crescendo, ne résoudre l'objectif principal du protagoniste qu'à la fin de l'histoire,... Mais de là à établir une théorie universelle qu'on nous impose un peu partout, il y a de la marge.
En fin de compte, à mon sens, la théorie des trois actes n'a qu'un seul but: donner un jargon aux producteurs pour qu'ils puissent indiquer aux scénaristes où rajouter du sexe pour booster l'histoire. "Ca manque de punch à la fin du deuxième acte: je connais justement une jeune actrice ambitieuse..."
Je vais donc vous exposer ma vision de cette stupidité théorique. Accrochez-vous: on a coutume de découper un scénario en trois grands actes: l'acte 1 (début), l'acte 2 (milieu), l'acte 3 (fin). Voilà, c'est tout. Mirobolant, n'est-ce pas?
Bon, j'avoue: j'exagère un tout petit peu. La vraie théorie décortique un peu plus le récit:
- l'acte 1 contient une exposition, dans laquelle on présente les personnages et la situation initiale.
- l'acte 1 se termine par un évènement déclencheur qui lance l'histoire sans retour arrière possible.
- l'acte 2 se divise en deux partie: la première montre une montée en puissance des forces mises en jeu, la deuxième montre la descente aux enfers du protagoniste.
- l'acte 2 se termine par le combat final.
- l'acte 3 montre la résolution du conflit.
C'est d'une simplicité et d'une évidence tellement instinctive que je ne comprends pas comment des auteurs peuvent s'étendre 200 pages sur le sujet. Ceci explique donc pourquoi je n'en ai jamais parlé avant.
La vraie question, c'est: "est-il bon que les auteurs aient conscience de l'emplacement de leurs 3 actes dans leurs scénarios?"
Mais je réponds par la négative. En effet, "on" (de nombreux auteurs reconnus et moins reconnus) conseille aux novices de contrôler la longueur des actes qu'ils écrivent: pas plus de 30 pages pour l'acte 1, pas moins de 50 pages pour l'acte 2, l'acte trois étant le plus court sans exception. Les raisons de ce conseil empoisonné sont compréhensibles: les novices ont tendance à écrire une exposition interminable avec un récit qui ne décolle jamais, à ne pas assez approfondir les conflits qui restent à un niveau superficiel et se résolvent de manière assez simple en fin de compte.
Mais la notion d'actes a des effets pervers: il détourne l'attention des apprentis-scénaristes vers des choses superficielles et leur retire partiellement la responsabilité d'un bon contenu, au profit d'une bonne structure.
Puisque cette notion d'actes est à mon sens intuitive et évidente (a-t-on idée d'écrire quelque chose sans début, sans milieu et sans fin?), il vaut mieux se l'enlever de l'esprit et se concentrer sur ce qui compte réellement: construire le récit de sorte qu'il tienne la route sur la longueur sans traîner au début.
Le découpage en actes n'est d'aucune aide pour arriver à ce résultat. Le travail est plus profond, et plus difficile. L'auteur doit systématiquement se demander si chaque scène fait avancer le schmilblick de façon "plaisante", c'est-à-dire qu'il y a une valeur ajoutée à la simple exposition des faits.
Ensuite, le travail sur la structure peut-être totalement indépendant de la théorie des trois actes. Quelques règles empiriques peuvent être conseillées, car elles ont fait leurs preuves: aller crescendo, ne résoudre l'objectif principal du protagoniste qu'à la fin de l'histoire,... Mais de là à établir une théorie universelle qu'on nous impose un peu partout, il y a de la marge.
En fin de compte, à mon sens, la théorie des trois actes n'a qu'un seul but: donner un jargon aux producteurs pour qu'ils puissent indiquer aux scénaristes où rajouter du sexe pour booster l'histoire. "Ca manque de punch à la fin du deuxième acte: je connais justement une jeune actrice ambitieuse..."
15 octobre 2006
Les relectures
Une fois la rédaction du scénario achevée, le travail est loin d'être fini. On dit souvent qu'écrire, c'est surtout ré-écrire. Car, en effet, à la relecture de nombreuses fautes peuvent sauter aux yeux. Comme un élève face à se dictée, le scénariste est prié de revoir sa copie avant même de la soumettre à qui que ce soit. La relecture est éprouvante: on connait déjà l'histoire, on n'a pas envie de tout relire en détails... Et puis quel auteur veut bien faire l'aveu qu'il se trompe parfois?
Or, une relecture, c'est ça: admettre son droit à l'erreur et, partant de là, améliorer son oeuvre. Le premier jet est rarement le bon. Même avec beaucoup de préparation, certains passages sont toujours un peu plus creux, certains personnages sous-exploités, mal définis, etc. Sans compter les fautes d'orthographe.
Les erreurs potentielles sont de natures très différentes. C'est pourquoi je ne vous propose pas de relire votre copie une seule fois, mais à plusieurs reprises, en vous concentrant systématiquement sur un élément particulier.
Voici la liste des relectures que je vous propose:
1) Personnages: Lire le script du point de vue d'un acteur. Son personnage évolue-t-il comme on le souhaite? L'acteur a-t-il de la matière pour nourir son personnage?
2) Dialogues: Chaque personnage a-t-il une voix particulière? Tous les dialogues sont-ils suffisament "typés" (sans être caricaturaux)? Ne sont-ils pas trop longs? Pas trop écrits? Le vocabulaire correspond-il au niveau intellectuel du personnage?
3) Relations: Les relations entre personnages evoluent-elle bien? Prend-on assez de temps pour les faire mûrir?
4) Descriptions: racourcir les descriptions, bien choisir le vocabulaire. Tout mettre à la voix active.
5) Dialogues: Couper chaque ligne de dialogue inutile. Etre sans pitié.
6) Humour: Peut-on rajouter l'une ou l'autre touche d'humour quelque part?
7) Raison d'être: Rôle de chaque scène. Couper les inutiles.
8) Objectifs: Chaque personnage doit avoir un objectif dans chaque scène.
9) Décor: Le Lieu de chaque scène est-il intéressant?
10) Actions: Au lieu de simplement discuter, les personnages font-ils quelque chose d'interessant? Il faut éviter le dialogue seul: l'accompagner d'actions.
11) Réalisme: Couper les développements contraires à la psychologie sommaire. Respecter un certain réalisme.
12) Structure: La structure globale du scénario est-elle cohérente et équilibrée?
Pour finir, lire les dialogues à haute voix: utile pour trouver les choses qui sonnent faux.
Le but du jeu, en fin de compte, c'est que le scénario tel qu'il est écrit corresponde exactement à l'image que vous vous en faite dans votre tête, en tant qu'auteur. Il faut réduire au maximum la distortion entre la perception qu'a l'auteur de son oeuvre et la perception du public.
Et pour cela, une seule solution: se relire!
Or, une relecture, c'est ça: admettre son droit à l'erreur et, partant de là, améliorer son oeuvre. Le premier jet est rarement le bon. Même avec beaucoup de préparation, certains passages sont toujours un peu plus creux, certains personnages sous-exploités, mal définis, etc. Sans compter les fautes d'orthographe.
Les erreurs potentielles sont de natures très différentes. C'est pourquoi je ne vous propose pas de relire votre copie une seule fois, mais à plusieurs reprises, en vous concentrant systématiquement sur un élément particulier.
Voici la liste des relectures que je vous propose:
1) Personnages: Lire le script du point de vue d'un acteur. Son personnage évolue-t-il comme on le souhaite? L'acteur a-t-il de la matière pour nourir son personnage?
2) Dialogues: Chaque personnage a-t-il une voix particulière? Tous les dialogues sont-ils suffisament "typés" (sans être caricaturaux)? Ne sont-ils pas trop longs? Pas trop écrits? Le vocabulaire correspond-il au niveau intellectuel du personnage?
3) Relations: Les relations entre personnages evoluent-elle bien? Prend-on assez de temps pour les faire mûrir?
4) Descriptions: racourcir les descriptions, bien choisir le vocabulaire. Tout mettre à la voix active.
5) Dialogues: Couper chaque ligne de dialogue inutile. Etre sans pitié.
6) Humour: Peut-on rajouter l'une ou l'autre touche d'humour quelque part?
7) Raison d'être: Rôle de chaque scène. Couper les inutiles.
8) Objectifs: Chaque personnage doit avoir un objectif dans chaque scène.
9) Décor: Le Lieu de chaque scène est-il intéressant?
10) Actions: Au lieu de simplement discuter, les personnages font-ils quelque chose d'interessant? Il faut éviter le dialogue seul: l'accompagner d'actions.
11) Réalisme: Couper les développements contraires à la psychologie sommaire. Respecter un certain réalisme.
12) Structure: La structure globale du scénario est-elle cohérente et équilibrée?
Pour finir, lire les dialogues à haute voix: utile pour trouver les choses qui sonnent faux.
Le but du jeu, en fin de compte, c'est que le scénario tel qu'il est écrit corresponde exactement à l'image que vous vous en faite dans votre tête, en tant qu'auteur. Il faut réduire au maximum la distortion entre la perception qu'a l'auteur de son oeuvre et la perception du public.
Et pour cela, une seule solution: se relire!
07 octobre 2006
La voix active
Un scénario de cinéma doit décrire des actions que l'on voit à l'écran. Il faut donc exclure tout ce qui n'est pas visible. Le raisonnement est binaire et il n'y a pas de zone intermédiaire.
C'est pourquoi tous les verbes sont à la voix active. Le passif est à proscrire. Par exemple: "Les bandits sont rattrapés par la voiture de police" devient "La voiture de police rattrape les bandits." On prend systématiquement le point de vue de celui qui fait l'action.
Cette façon de rendre l'action par les mots va jusqu'au choix du vocabulaire. "Les bandits s'éloignent des policiers" devient "Les bandits bondissent hors de leur véhicule." Etc... On visualise beaucoup mieux les mouvements avec des verbes très concrets.
Dans la construction du récit, il faut aussi garder à l'esprit la notion de voix active. Par exemple, lorsque l'on établit un séquencier, il peut être tentant d'écrire: "Le héros réfléchit à la proposition de la fille avant d'accepter".
Mais, au cinéma, "réfléchir à une proposition", c'est impossible à traduire en images. Il faut donc trouver des actions non-passives pour transformer cette réflexion abstraite en images concrètes et compréhensibles pour le spectateur.
Pour arriver à ce résultat, il faut passer par des symboles visuels porteurs de sens: un objet, un lieu... Le recours au dialogue est évidemment facile, mais attention à ne pas tomber dans l'exposition lourde.
Parfois, il est difficile de se rendre compte du degré de passivité d'un personnage au début de l'écriture. Le récit semble bien construit, il y a trois actes et des objectifs à atteindre. Mais ces objectifs permettent-ils au protagoniste d'effectuer des tâches visuelles? Pas toujours.
Faites-le test: prenez un séquencier pour une histoire que vous avez imaginée et notez toutes les actions que le protagoniste doit faire. On arrive à ce genre de résultats:
- Rencontrer la fille
- Tomber amoureux
- Se faire doubler par le méchant
- Etre ignoré par la fille
- Imaginer un stratagème pour conquérir la fille
- Voir la fille embrasser le méchant
- Tomber en dépression
- Ecouter les conseils de son grand-frère
- Casser la gueule du méchant
- Etre rejeté par la fille ("sale brute!")
- Essayer la méthode douce
- Embrasser la fille
Voilà. Dans le lot, il y a plusieurs actions qui n'en sont pas: tomber amoureux, se faire doubler, être ignoré, imaginer un plan, tomber en dépression, écouter des conseils, être rejeté, ... Ce sont des choses invisibles, ou très passives. Le héros n'est pas maître de sa destinée. Etre rejeté par la fille doit être retiré de la liste car ce n'est pas une action faite par le protagoniste, mais par un autre personnage.
Il nous reste:
- Rencontrer la fille
- Casser la gueule du méchant
- Essayer la méthode douce
- Embrasser la fille.
Peu d'actions réellement faites par le protagoniste en fin de compte. Il faut donc à tout prix reconstruire le récit dans un sens qui permettra au protagoniste de faire des choses de son propre chef pour arriver à résultat éventuellement similaire dans le fond. Mais il faut veiller à remplir les 90 minutes du film de "stimulus dramatique". Ce stimulus, c'est l'action faite par le protagoniste. Sans stimulus, on s'ennuie.
Terminons avec le même exemple. La liste, augmentée avec toutes sortes d'actions que le héros est susceptible d'effectuer:
- Aller en soirée
- Repérer une fille
- La suivre
- Lui parler
- Lui offrir un verre
- Rire avec elle
- Lui toucher la main
[ici le méchant le bouscule et drague a fille]
- Partir de la soirée en pleurant
- Parler à la fille à l'école
- L'inviter au cinéma
- Lui offrir des pop-corn
- L'embrasser
[ici il se prend un bide]
- Demander conseil au grand-frère
- Faire des pompages
- Mettre du gel dans ses cheveux
- Casser la gueule du méchant
[il se fait rejeter par la fille]
- S'excuser
- Offrir des fleurs
- Aider le méchant à faire ses devoirs
- Embrasser la fille
Voilà qui est déjà plus consistant (quique peu original, c'était juste pour l'exemple!). Chaque personnage dispose ainsi de sa "liste d'actions", qui permet de contrôler immédiatement le degré de passivité d'un personnage et éventuellement de modifier le séquencier en conséquence.
C'est pourquoi tous les verbes sont à la voix active. Le passif est à proscrire. Par exemple: "Les bandits sont rattrapés par la voiture de police" devient "La voiture de police rattrape les bandits." On prend systématiquement le point de vue de celui qui fait l'action.
Cette façon de rendre l'action par les mots va jusqu'au choix du vocabulaire. "Les bandits s'éloignent des policiers" devient "Les bandits bondissent hors de leur véhicule." Etc... On visualise beaucoup mieux les mouvements avec des verbes très concrets.
Dans la construction du récit, il faut aussi garder à l'esprit la notion de voix active. Par exemple, lorsque l'on établit un séquencier, il peut être tentant d'écrire: "Le héros réfléchit à la proposition de la fille avant d'accepter".
Mais, au cinéma, "réfléchir à une proposition", c'est impossible à traduire en images. Il faut donc trouver des actions non-passives pour transformer cette réflexion abstraite en images concrètes et compréhensibles pour le spectateur.
Pour arriver à ce résultat, il faut passer par des symboles visuels porteurs de sens: un objet, un lieu... Le recours au dialogue est évidemment facile, mais attention à ne pas tomber dans l'exposition lourde.
Parfois, il est difficile de se rendre compte du degré de passivité d'un personnage au début de l'écriture. Le récit semble bien construit, il y a trois actes et des objectifs à atteindre. Mais ces objectifs permettent-ils au protagoniste d'effectuer des tâches visuelles? Pas toujours.
Faites-le test: prenez un séquencier pour une histoire que vous avez imaginée et notez toutes les actions que le protagoniste doit faire. On arrive à ce genre de résultats:
- Rencontrer la fille
- Tomber amoureux
- Se faire doubler par le méchant
- Etre ignoré par la fille
- Imaginer un stratagème pour conquérir la fille
- Voir la fille embrasser le méchant
- Tomber en dépression
- Ecouter les conseils de son grand-frère
- Casser la gueule du méchant
- Etre rejeté par la fille ("sale brute!")
- Essayer la méthode douce
- Embrasser la fille
Voilà. Dans le lot, il y a plusieurs actions qui n'en sont pas: tomber amoureux, se faire doubler, être ignoré, imaginer un plan, tomber en dépression, écouter des conseils, être rejeté, ... Ce sont des choses invisibles, ou très passives. Le héros n'est pas maître de sa destinée. Etre rejeté par la fille doit être retiré de la liste car ce n'est pas une action faite par le protagoniste, mais par un autre personnage.
Il nous reste:
- Rencontrer la fille
- Casser la gueule du méchant
- Essayer la méthode douce
- Embrasser la fille.
Peu d'actions réellement faites par le protagoniste en fin de compte. Il faut donc à tout prix reconstruire le récit dans un sens qui permettra au protagoniste de faire des choses de son propre chef pour arriver à résultat éventuellement similaire dans le fond. Mais il faut veiller à remplir les 90 minutes du film de "stimulus dramatique". Ce stimulus, c'est l'action faite par le protagoniste. Sans stimulus, on s'ennuie.
Terminons avec le même exemple. La liste, augmentée avec toutes sortes d'actions que le héros est susceptible d'effectuer:
- Aller en soirée
- Repérer une fille
- La suivre
- Lui parler
- Lui offrir un verre
- Rire avec elle
- Lui toucher la main
[ici le méchant le bouscule et drague a fille]
- Partir de la soirée en pleurant
- Parler à la fille à l'école
- L'inviter au cinéma
- Lui offrir des pop-corn
- L'embrasser
[ici il se prend un bide]
- Demander conseil au grand-frère
- Faire des pompages
- Mettre du gel dans ses cheveux
- Casser la gueule du méchant
[il se fait rejeter par la fille]
- S'excuser
- Offrir des fleurs
- Aider le méchant à faire ses devoirs
- Embrasser la fille
Voilà qui est déjà plus consistant (quique peu original, c'était juste pour l'exemple!). Chaque personnage dispose ainsi de sa "liste d'actions", qui permet de contrôler immédiatement le degré de passivité d'un personnage et éventuellement de modifier le séquencier en conséquence.
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