Camarades,
Je vous ai laissé sans nouvelles depuis plus d'un an maintenant. Apparemment, je n'ai manqué à personne, donc je reviens exclusivement par sursaut d'orgueil.
En réalité, le monde du scénario me semble désormais bien lointain hélas. Je suis retombé sur ce blog suite à l'actualité entourant le film "The Interview" et la guerre froide puérile entre la Corée du Nord et les Etats-Unis. En effet, j'avais, à l'occasion du "Pitch Project" de 2011, écrit un pitch qui - dans mes souvenirs - semblait assez proche de celui de "The Interview"... Juste assez pour que j'aille vérifier. Bon, en fait, dans le pitch, j'évoquais juste la Corée du Nord et rien d'autre... Fichue mémoire!
Mais revenir ici m'a donné une bouffée de nostalgie et je me dois désormais de faire le point sur ma carrière et mes ambitions.
Disons-le tout net: aucune de mes ambitions artistiques n'aura été comblée, et je n'ai pas été capable de mener à bien mes rêves. Je fête bientôt mes 30 ans, et je gagne relativement bien ma vie en tant que... programmeur informatique (long story). Yep: l'exact opposé de tout ce dont je rêvais.
Ne me comprenez pas de travers, j'aime mon métier et l'activité de programmation me procure pas mal de plaisir (comparable à celui qu'on ressent en écrivant, une sorte de plénitude "zen" quand on est "in the zone"). Bien entendu, je n'écrivais pas uniquement pour atteindre cet espèce de nirvana méditatif, mais c'était la manifestation la plus concrète du plaisir que l'écriture provoquait.
Le plaisir de raconter une histoire, de provoquer des émotions, a été entièrement éradiqué de ma vie. Dans un accès de colère orgueilleux, j'ai décidé que je n'étais pas digne d'écrire des histoires. J'ai arrêté mes scénarios, mes romans, et même le journalisme.
Je m'en suis donc tenu à écrire des listes d'instructions à destination d'une machine. Avec la douce certitude que la machine, toujours fidèle à elle-même, ne me trahirait jamais. En ce sens, la programmation est une activité extrêmement reposante.
A un niveau superficiel, je suis sûrement plus heureux aujourd'hui que quand je me prenais pour un écrivain. Je gagne bien ma vie, mon emploi est stable, mes parents sont contents, et les choses que je produis (en général, des sites internet) sont utiles à mes clients.
Mais creusez un peu - ou lisez cet article - et vous comprendrez bien vite que le manque est là. Qu'il ne partira jamais, et qu'il me ronge. Et que programmer des ordinateurs n'est qu'un pâle substitut, qui remplace le prestige par l'argent, mais qui suffoque toute bravoure, toute fierté. Je ne suis plus le héros de ma vie, je suis devenu le figurant dans la vie de mon employeur.
Le ton de cet article est d'une aigreur à faire doubler les ventes de Rennie. Pardon pour cela. Mais c'est un peu la conclusion triste de ce blog qui fut, je l'espère, souvent plein d'espoir. Et c'est aigre car il n'y a plus vraiment d'espoir. Bien sûr, on pourra toujours me dire qu'il n'est jamais trop tard pour écrire. Que je peux encore inventer des histoires! Que je peux encore faire des séries TV!
Bien sûr...
Mais si je n'avais plus vraiment envie? Si je n'avais plus la force... Si, dans mon rêve, il était sous-entendu: "je deviendrai écrivain car je suis bon pour cela"? Et que la vie réelle m'avait systématiquement prouvé qu'en réalité, je n'étais pas si bon que je l'espérais? Si mon rêve ne résistait pas à la nécessité de faire ses preuves envers et contre tout? Non, dans mon rêve, ça se passait facilement, car mon talent était évident...
Dans la vraie vie, c'est mon talent pour l'informatique qui semble trouver grâce aux yeux de ceux qui peuvent me donner des projets intéressants. Un talent pour lequel je n'ai jamais étudié, ni pour lequel je n'ai jamais écrit le moindre blog. Un talent qui ne m'a jamais fait rêvé outre mesure. Mais un talent qui rend tout si facile.
Est-ce que c'est ça, devenir adulte? Se rendre compte qu'on suivait le mauvais rêve depuis le départ? Ou accepter que le rêve doit rester un rêve? Ou comprendre que l'on ne peut jamais vraiment se connaître soi-même? Que l'on se croit fort dans des domaines où l'on est à peine médiocre? Et d'autre domaines où l'on se croit faible, mais où l'on surnage tout de même?
Devenir adulte, ça craint un peu... Car malgré tout ça, on ne m'enlèvera jamais totalement de l'idée que j'aurais fait un bon *jeune* scénariste.
Maintenant, au mieux, je serai un bon *vieux* scénariste.
20 décembre 2014
08 mai 2013
Les séries pour enfants des années 90
Je suis en plein trip régressif en ce moment. Après avoir regardé les dessins animés bien connus de mon enfance (tout ce qui passait sur Dorothée et les Minikeums), j'ai creusé un peu plus profondément dans le puits de ma mémoire pour ressortir des tréfonds les séries injustement oubliées de cette époque.
En les regardant avec un oeil d'adulte, je ne peux admettre qu'une conclusion: c'était vachement bien! Petit tour d'horizon des séries pour enfants des années 90 que je préfère.
Les maîtres des sortilèges (Spellbinder)
Série australienne, les Maîtres des Sortilèges raconte les aventures de jeunes qui se perdent dans un monde parallèle ambiance steampunk (grosse influence de Nikola Tesla) dominé par les terribles "Spellbinders" qui maîtrisent seuls l'électricité et tyrannisent la population. Les jeunes vont héroïquement rétablir la justice dans ce monde parallèle, tout en cherchant à retrouver le chemin de leur maison.
Bien entendu, les effets spéciaux et la musique Bontempi un peu cheap peuvent aujourd'hui faire sourire. Mais une chose est sûre: les scénarios sont vachement captivants. L'avantage des séries pour enfants, c'est qu'elles ne perdent pas de temps: en un épisode, des ados passent d'un monde à l'autre, sont capturés, s'enfuient, etc. Bref, on ne s'ennuie pas une seconde.
D'autre part, cette série possède un imaginaire libérateur pour les enfants: sans leurs parents, dans un monde où ils peuvent jouer à jeu égal avec les adultes, ils ont le pouvoir de changer les choses. Un soupçon de science et de magie rendent le tout très excitant. C'est comme une bonne campagne de Donjons et Dragons: tout est possible!
A noter que les créateurs de la série étaient aussi à l'origine de Alana ou le futur imparfait, série du même genre.
L'odyssée fantastique ou imaginaire (The Jellybean Odyssey)
Série canadienne, L'odyssée fantastique se déroule entièrement dans la tête d'un ado qui est dans le coma. Dans ce monde imaginaire, les adultes ont complètement disparu, et les enfants, loin d'être des petits anges, on fondé un état totalitaire dans lequel nos héros doivent rétablir la justice.
Reprenant à son compte la thèse de Sa Majesté Des Mouches, cette série est fichtrement plus intelligente qu'elle n'en à l'air. Sous des airs d'aventures légères où des enfants parcourent des décors post-apocalyptiques façon Mad Max, on trouve une caricature bien trempée des régimes totalitaires et de la bêtise des foules.
Encore un fois, la série fonctionne bien car elle libère l'enfant de tout ingérence des adultes. La série s'adresse directement aux enfants, et les atteint directement à un niveau psychologique primal: la frustration d'être tout le temps enfermé dans le carcans imposé par les adultes.
La série sert donc d'exutoire, tout en ayant l'avantage d'être bien écrite et d'être divertissante: les aventures que nos héros vivent sont haletantes, pleines de rebondissements, et ont un lien symbolique avec le monde réel. Le suspense est donc constant: quand le héros va-t-il sortir de son coma?
Mission top-secret
Encore des australiens! Mission top secret raconte les aventures d'un groupe d'enfants dispersés aux quatre coins de la planète mais travaillant tous pour l'organisation Alpha Centauri, dont l'objectif est... de faire le bien dans le monde (comme dans MacGyver et sa fondation Phoenix, c'est flou).
Cela peu sembler cocasse de fare travailler dans enfants dans une organisation de contre-espionnage mondial, mais ça fonctionne très bien. Contrairement aux séries évoquées ci-dessus, les enfants ne sont pas ici entièrement libres, ils sont supervisés par le chef de Alpha Centauri, Sir Joshua, un vieux scientifique riche qui tient plus du grand-père que du patron.
En réalité, cette série est un cours de géographie, de science, d'histoire, sous le masque d'une petite intrigue d'aventure. Sur le même mode que Carmen Sandiego, on voyage beaucoup (en réalité, dans les pays diffusant la série), et au passage on apprend plein de choses (je me souviens toujours du Chateau d'Ambroise où Léonard de Vinci a vécu).
Océane (Ocean Girl)
Encore et toujours des australiens... Océane raconte l'histoire d'une fille qui vit sur une île déserte et sous l'océan, loin de la civilisation. Mais un jours elle est découverte par une équipe de scientifiques qui vivent dans un cité sous-marine (ORCA). Les enfants de ces scientifiques se lient d'amitié avec Océane, ce qui crée quelques frictions avec les adultes.
Là, on est purement dans la série écolo en plein (limite SOS Polluards, pour ceux qui s'en souviennent). C'est parfois un peu moralisateur, mais c'est avant tout de la science fiction, puisque la fille de l'eau est une extra-terrestre.
Beaucoup moins libératrice dans son imaginaire que les autres séries mentionnées, Océane est plus terre à terre (mer à mer, si vous préférez), avec une omniprésence d'adultes qui contrôlent tout. Ici, les enfants restent vraiment des enfants - avec tout ce que cela comporte de limites. La cité ORCA est assez claustrophobique et l'ambiance est souvent tendue. Cela crée du bon drame, mais peut-être pour des enfants plus mûrs.
Il faut noter que cette série a connu un grand succès et que son créateur est aussi l'auteur de la série H2O, beaucoup plus récente et dans l'air du temps, mais très réussie également.
Les Intrépides
Série canadienne francophone, qui révéla l'acteur Lorant Deutsch, Les Intrépides raconte l'histoire de Tom et Julie, deux ados, qui présentent une émission de radio pirate dans laquelle ils viennent en aide aux auditeurs en détresse. Chaque épisode est l'occasion de résoudre une nouvelle affaire.
Bon, ils faut être honnête: cette série a mal vieilli. Mais à l'époque, j'étais fan. Julie était mignonne, mais pas trop, juste assez pour être l'équipière parfaite. Plein de ressources, nos deux héros se sortaient toujours d'embûches et aidaient le monde entier.
Ce qu'il manquait à cette série pour être vraiment géniale, était sans doute l'ambition de créer des arcs narratifs plus longs et d'éviter la redite. Avec les Intrépides, on avait toujours le même schéma: les Intrépides sauvent un ado en détresse, mais le méchant en fin de compte n'était pas si méchant que ça - c'était sûrement un malentendu - et tout le monde s'en sort bien.
Ce côté un peu cucul, qu'on ne retrouve pas dans les séries qui s'adressent vraiment aux enfants, rendait le tout un peu mou et fade. Mais cela étant dit, les épisodes en eux-même étaient bien foutus. Il y avait du mystère, du suspense, et un côté MacGyver débrouillard très plaisant.
Conclusion
Je n'ai pas envie de faire le vieux con et de dire que c'était mieux avant... Mais quand même: je ne retrouve plus ce genre de séries à l'imaginaire débordant aujourd'hui. Dans les séries pour enfants d'aujourd'hui (produites principalement par Disney), l'imaginaire est réduit à néant, cadré par des adultes, dans une ambiance de concours de popularité à l'école, très désagréable.
Que ce soit Zak et Cody, iCarly, Big Time Rush, etc. Les années 2000 sont les années du "moi je rêve d'être une star". C'est le "moi je" alors que les années 90 mettaient en avant l'entraide et la rebellion face aux adultes.
Une constante, dans les séries que j'ai cité: les histoires de coeur sont reléguées au deuxième plan, voire absentes totalement. C'est d'après moi un véritable gage de qualité du point de vue de l'imaginaire. Toutes les séries pour enfants/ados avec des histoire de coeur sont assez mauvaises en général. Skins est peut-être l'unique exception.
Autre élément clé: donner à l'enfant des attributs d'adultes. Il de se débrouiller seul, sans repère, face à l'adversité. Le faire prendre des initiatives. C'est comme ça qu'il développe son imaginaire.
Enfin, ne pas avoir peur de la noirceur et de la réalité. Les enfants n'ont pas besoin d'être cajolés. Ils n'ont pas envie qu'on leur fasse la leçon. Le leçon sera faite d'elle-même lorsque les héros montreront l'exemple sans s'en vanter.
En les regardant avec un oeil d'adulte, je ne peux admettre qu'une conclusion: c'était vachement bien! Petit tour d'horizon des séries pour enfants des années 90 que je préfère.
Les maîtres des sortilèges (Spellbinder)
Bien entendu, les effets spéciaux et la musique Bontempi un peu cheap peuvent aujourd'hui faire sourire. Mais une chose est sûre: les scénarios sont vachement captivants. L'avantage des séries pour enfants, c'est qu'elles ne perdent pas de temps: en un épisode, des ados passent d'un monde à l'autre, sont capturés, s'enfuient, etc. Bref, on ne s'ennuie pas une seconde.
D'autre part, cette série possède un imaginaire libérateur pour les enfants: sans leurs parents, dans un monde où ils peuvent jouer à jeu égal avec les adultes, ils ont le pouvoir de changer les choses. Un soupçon de science et de magie rendent le tout très excitant. C'est comme une bonne campagne de Donjons et Dragons: tout est possible!
A noter que les créateurs de la série étaient aussi à l'origine de Alana ou le futur imparfait, série du même genre.
L'odyssée fantastique ou imaginaire (The Jellybean Odyssey)
Reprenant à son compte la thèse de Sa Majesté Des Mouches, cette série est fichtrement plus intelligente qu'elle n'en à l'air. Sous des airs d'aventures légères où des enfants parcourent des décors post-apocalyptiques façon Mad Max, on trouve une caricature bien trempée des régimes totalitaires et de la bêtise des foules.
Encore un fois, la série fonctionne bien car elle libère l'enfant de tout ingérence des adultes. La série s'adresse directement aux enfants, et les atteint directement à un niveau psychologique primal: la frustration d'être tout le temps enfermé dans le carcans imposé par les adultes.
La série sert donc d'exutoire, tout en ayant l'avantage d'être bien écrite et d'être divertissante: les aventures que nos héros vivent sont haletantes, pleines de rebondissements, et ont un lien symbolique avec le monde réel. Le suspense est donc constant: quand le héros va-t-il sortir de son coma?
Mission top-secret
Cela peu sembler cocasse de fare travailler dans enfants dans une organisation de contre-espionnage mondial, mais ça fonctionne très bien. Contrairement aux séries évoquées ci-dessus, les enfants ne sont pas ici entièrement libres, ils sont supervisés par le chef de Alpha Centauri, Sir Joshua, un vieux scientifique riche qui tient plus du grand-père que du patron.
En réalité, cette série est un cours de géographie, de science, d'histoire, sous le masque d'une petite intrigue d'aventure. Sur le même mode que Carmen Sandiego, on voyage beaucoup (en réalité, dans les pays diffusant la série), et au passage on apprend plein de choses (je me souviens toujours du Chateau d'Ambroise où Léonard de Vinci a vécu).
Océane (Ocean Girl)
Là, on est purement dans la série écolo en plein (limite SOS Polluards, pour ceux qui s'en souviennent). C'est parfois un peu moralisateur, mais c'est avant tout de la science fiction, puisque la fille de l'eau est une extra-terrestre.
Beaucoup moins libératrice dans son imaginaire que les autres séries mentionnées, Océane est plus terre à terre (mer à mer, si vous préférez), avec une omniprésence d'adultes qui contrôlent tout. Ici, les enfants restent vraiment des enfants - avec tout ce que cela comporte de limites. La cité ORCA est assez claustrophobique et l'ambiance est souvent tendue. Cela crée du bon drame, mais peut-être pour des enfants plus mûrs.
Il faut noter que cette série a connu un grand succès et que son créateur est aussi l'auteur de la série H2O, beaucoup plus récente et dans l'air du temps, mais très réussie également.
Les Intrépides
Bon, ils faut être honnête: cette série a mal vieilli. Mais à l'époque, j'étais fan. Julie était mignonne, mais pas trop, juste assez pour être l'équipière parfaite. Plein de ressources, nos deux héros se sortaient toujours d'embûches et aidaient le monde entier.
Ce qu'il manquait à cette série pour être vraiment géniale, était sans doute l'ambition de créer des arcs narratifs plus longs et d'éviter la redite. Avec les Intrépides, on avait toujours le même schéma: les Intrépides sauvent un ado en détresse, mais le méchant en fin de compte n'était pas si méchant que ça - c'était sûrement un malentendu - et tout le monde s'en sort bien.
Ce côté un peu cucul, qu'on ne retrouve pas dans les séries qui s'adressent vraiment aux enfants, rendait le tout un peu mou et fade. Mais cela étant dit, les épisodes en eux-même étaient bien foutus. Il y avait du mystère, du suspense, et un côté MacGyver débrouillard très plaisant.
Conclusion
Je n'ai pas envie de faire le vieux con et de dire que c'était mieux avant... Mais quand même: je ne retrouve plus ce genre de séries à l'imaginaire débordant aujourd'hui. Dans les séries pour enfants d'aujourd'hui (produites principalement par Disney), l'imaginaire est réduit à néant, cadré par des adultes, dans une ambiance de concours de popularité à l'école, très désagréable.
Que ce soit Zak et Cody, iCarly, Big Time Rush, etc. Les années 2000 sont les années du "moi je rêve d'être une star". C'est le "moi je" alors que les années 90 mettaient en avant l'entraide et la rebellion face aux adultes.
Une constante, dans les séries que j'ai cité: les histoires de coeur sont reléguées au deuxième plan, voire absentes totalement. C'est d'après moi un véritable gage de qualité du point de vue de l'imaginaire. Toutes les séries pour enfants/ados avec des histoire de coeur sont assez mauvaises en général. Skins est peut-être l'unique exception.
Autre élément clé: donner à l'enfant des attributs d'adultes. Il de se débrouiller seul, sans repère, face à l'adversité. Le faire prendre des initiatives. C'est comme ça qu'il développe son imaginaire.
Enfin, ne pas avoir peur de la noirceur et de la réalité. Les enfants n'ont pas besoin d'être cajolés. Ils n'ont pas envie qu'on leur fasse la leçon. Le leçon sera faite d'elle-même lorsque les héros montreront l'exemple sans s'en vanter.
08 avril 2013
Julie Lescaut, fin du supplice
TF1 a annoncé l'arrêt définitif de la série Julie Lescaut, après 21 ans de bons et loyaux services. Bien entendu, on se doute que les déclarations douteuses de Véronique Genest ces derniers temps ont poussé prématurément la série vers la porte de sortie (même si elle s'en défend). Mais la fin de Julie Lescaut marque surtout le passage symbolique dans une nouvelle ère audiovisuelle: aujourd'hui, il n'est plus possible de faire de la télévision comme en 1992. Passage en revue des pratiques obsolètes.
L'héroïne 100% pur porc
Julie Lescaut représente l'héroïne française moyenne classique: jolie sans être sexuellement oppressante, pétrie de bons sentiments, blanche de peau, toujours fidèle et prête au sacrifice, raisonnable, polie, conciliante, appaisante, de centre-gauche avec parfois un bon sens paysan de droite, mais jamais dans l'extrêmisme (je parle bien du personnage, pas de l'actrice, qui en est à peu de chose près l'exact opposé).
Cette recette pour créer des héros ne fonctionne plus aujourd'hui. C'est le modèle "Superman", qui s'écroule face à l'ambiguité du modèle "Batman": les anti-héros, les héros torturés, avec une face obscure, sont bien plus intéressants, surtout dans un système dramaturgique sériel (pensez Dr. House, Dexter, Les Sopranos, etc.)
De même, Julie Lescaut servait de véhicule idéologique neutre: représentant le dénominateur commun de toutes les tendances politiques, elle en devenait très fade. Julie Lescaut, c'est comme Tintin, une coquille vide qui sert d'interface au spectateur pour se projeter dans le récit.
Mais si la fadeur de Tintin était équilibrée par l'exubérance de ses personnages secondaires, Julie Lescaut se trouvait bien seule dans une équipe où le plus marquant de tous était... Mouss Diouf. Maigre récompense.
Aujourd'hui, il ne faut plus avoir peur de montrer un héros avec ses convictions fortes, et aliénantes. Un mafieux catholique? Très bien! Un fonctionnaire libertaire? Parfait! Lorsque la prise de position du personnage est comprise par le scénariste, pas moquée, elle devient un trait de caractère qui renforce l'identification du spectateur: certes, il ne partage pas son avis, mais il partage son ressenti. C'est plus important.
Un rythme trop lent
La série s'arrêtera donc après 101 épisodes en 21 ans. Soit cinq épisodes par an. C'est trop peu! Beaucoup trop peu! Le minmum acceptable pour une série, c'est 12 épisodes par an: ça permet de faire un épisode par semaine pendant une saison. Tout juste assez pour s'en souvenir l'année d'après.
Mais cinq épisodes, ça oblige à de la contorsion de programmateur pour caser les épisodes inédits entre une floppée de rediffusions qui diluent l'intérêt de la série. On en perd le fil, donc la continuité, et donc, par réaction, les scénaristes limitent au possible toute continuité. On est vraiment dans de la série non-feuilletonnante, dans l'enfilade de one-shot.
Bien sûr, on retrouvera quelques lignes conductrices ci et là, mais sans enthousiasme: Julie Lescaut est une série qui "se laisse voir" et non qui "se regarde". C'est pratique pour ratisser large, mais pathétique pour l'image de la chaîne. D'ailleurs, le public avait une fâcheuse tendance au vieillissement. Les jeunes ne regardent une série que si elle les motive un tant soit peu. Sinon, ils ont mieux à faire: internet et les jeux-vidéo sont des compagnons plus adaptés à leurs intérêts.
La recette de papa
Julie Lescaut, c'est "la télévision de papa". Un produit adapté à un autre temps. Reproduire cette recette aujourd'hui, c'est voué à l'échec. Tous les ingrédients ont été tellement réutilisés par les diffuseurs que leur ingestion ne provoque que la nausée.
Tout d'abor, les séries où le personnage principal se définit uniquement par son métier, c'est fini.
Julie Lescaut, c'est une flic. Et elle est rousse. Voilà tout ce qu'on peut dire en 21 ans d'histoires.
Comparez avec Dr House, dont on sait que c'est un médecin, mais ce n'est pas ce qui le définit en tant qu'être humain. Avant d'être médecin, c'est un salopard cynique bourré de démons qui les évacue dans la drogue et l'exercice de la médecine. Son métier n'est qu'un effet secondaire.
Julie Lescaut, c'est aussi une série sans surprises, sans tension. On pourrait aller jusqu'à dire que c'est une série sans dramaturgie. Certes, les personnages parlent et bougent, parfois ils agitent une arme, mais tout ça c'est comme agiter du vent. En réalité, en profondeur, c'est le status quo éternel.
On ne se souviendra jamais d'aucune intrigue hors du commun de Julie Lescaut. Ni d'une saison moins réussie que les autres, ou plus bizarre que d'habitude, ou plus rocambolesque, ou plus romantique d'ailleurs. Rien ne dépasse des lignes. Bien droites, les lignes.
Il est temps aujourd'hui de faire éclater ces lignes et de faire place, même sur TF1, à de la fiction engageante. Il ne faut plus viser le plus grand dénominateur commun, mais parier sur la force dramatique de personnages qui existent avec leurs faiblesses et leur réalité parfois obscure.
Il faut jeter la recette de papa, et inventer la recette de fiston.
L'héroïne 100% pur porc
Julie Lescaut représente l'héroïne française moyenne classique: jolie sans être sexuellement oppressante, pétrie de bons sentiments, blanche de peau, toujours fidèle et prête au sacrifice, raisonnable, polie, conciliante, appaisante, de centre-gauche avec parfois un bon sens paysan de droite, mais jamais dans l'extrêmisme (je parle bien du personnage, pas de l'actrice, qui en est à peu de chose près l'exact opposé).
Cette recette pour créer des héros ne fonctionne plus aujourd'hui. C'est le modèle "Superman", qui s'écroule face à l'ambiguité du modèle "Batman": les anti-héros, les héros torturés, avec une face obscure, sont bien plus intéressants, surtout dans un système dramaturgique sériel (pensez Dr. House, Dexter, Les Sopranos, etc.)
De même, Julie Lescaut servait de véhicule idéologique neutre: représentant le dénominateur commun de toutes les tendances politiques, elle en devenait très fade. Julie Lescaut, c'est comme Tintin, une coquille vide qui sert d'interface au spectateur pour se projeter dans le récit.
Mais si la fadeur de Tintin était équilibrée par l'exubérance de ses personnages secondaires, Julie Lescaut se trouvait bien seule dans une équipe où le plus marquant de tous était... Mouss Diouf. Maigre récompense.
Aujourd'hui, il ne faut plus avoir peur de montrer un héros avec ses convictions fortes, et aliénantes. Un mafieux catholique? Très bien! Un fonctionnaire libertaire? Parfait! Lorsque la prise de position du personnage est comprise par le scénariste, pas moquée, elle devient un trait de caractère qui renforce l'identification du spectateur: certes, il ne partage pas son avis, mais il partage son ressenti. C'est plus important.
Un rythme trop lent
La série s'arrêtera donc après 101 épisodes en 21 ans. Soit cinq épisodes par an. C'est trop peu! Beaucoup trop peu! Le minmum acceptable pour une série, c'est 12 épisodes par an: ça permet de faire un épisode par semaine pendant une saison. Tout juste assez pour s'en souvenir l'année d'après.
Mais cinq épisodes, ça oblige à de la contorsion de programmateur pour caser les épisodes inédits entre une floppée de rediffusions qui diluent l'intérêt de la série. On en perd le fil, donc la continuité, et donc, par réaction, les scénaristes limitent au possible toute continuité. On est vraiment dans de la série non-feuilletonnante, dans l'enfilade de one-shot.
Bien sûr, on retrouvera quelques lignes conductrices ci et là, mais sans enthousiasme: Julie Lescaut est une série qui "se laisse voir" et non qui "se regarde". C'est pratique pour ratisser large, mais pathétique pour l'image de la chaîne. D'ailleurs, le public avait une fâcheuse tendance au vieillissement. Les jeunes ne regardent une série que si elle les motive un tant soit peu. Sinon, ils ont mieux à faire: internet et les jeux-vidéo sont des compagnons plus adaptés à leurs intérêts.
La recette de papa
Julie Lescaut, c'est "la télévision de papa". Un produit adapté à un autre temps. Reproduire cette recette aujourd'hui, c'est voué à l'échec. Tous les ingrédients ont été tellement réutilisés par les diffuseurs que leur ingestion ne provoque que la nausée.
Tout d'abor, les séries où le personnage principal se définit uniquement par son métier, c'est fini.
Julie Lescaut, c'est une flic. Et elle est rousse. Voilà tout ce qu'on peut dire en 21 ans d'histoires.
Comparez avec Dr House, dont on sait que c'est un médecin, mais ce n'est pas ce qui le définit en tant qu'être humain. Avant d'être médecin, c'est un salopard cynique bourré de démons qui les évacue dans la drogue et l'exercice de la médecine. Son métier n'est qu'un effet secondaire.
Julie Lescaut, c'est aussi une série sans surprises, sans tension. On pourrait aller jusqu'à dire que c'est une série sans dramaturgie. Certes, les personnages parlent et bougent, parfois ils agitent une arme, mais tout ça c'est comme agiter du vent. En réalité, en profondeur, c'est le status quo éternel.
On ne se souviendra jamais d'aucune intrigue hors du commun de Julie Lescaut. Ni d'une saison moins réussie que les autres, ou plus bizarre que d'habitude, ou plus rocambolesque, ou plus romantique d'ailleurs. Rien ne dépasse des lignes. Bien droites, les lignes.
Il est temps aujourd'hui de faire éclater ces lignes et de faire place, même sur TF1, à de la fiction engageante. Il ne faut plus viser le plus grand dénominateur commun, mais parier sur la force dramatique de personnages qui existent avec leurs faiblesses et leur réalité parfois obscure.
Il faut jeter la recette de papa, et inventer la recette de fiston.
03 avril 2013
Game of Thrones, ou l'art de la contrariété
La troisième saison de Game of Thrones vient de commencer en grande pompe (il a presque même complètement éclipsé le retour de Doctor Who), avec un premier épisode dont les médias disent qu'il est "le plus piraté du monde". J'ignore comme sont effectués les calculs, mais on les croit sur parole. L'épisode en lui-même était plutôt moyen (pareil pour Doctor Who d'ailleurs), mais c'est pour moi l'occasion d'analyser la série avec un grille de lecture particulière: l'art de la contrariété.
Les personnages de la série courent tous derrière une chimère: pour les uns, c'est l'honneur, pour les autres, c'est le pouvoir. Même Tyrion Lannister, dont on a pu croire qu'il ne s'intéressait qu'aux plaisirs bien concrets de la chair, s'est abandonné aux jeux de pouvoir et, pire, à l'amour romantique.
Dans cette course insensée, tous les personnages font constamment face à de grosses contrariétés: malgré tous leurs plans, ils n'obtiennent jamais ce qu'ils veulent.
Bien entendu, c'est une des règles de base de la dramaturgie de contrer les plans des héros, pour mieux les mettre en situation de conflit et faire ressortir leur humanité. En effet, c'est sous des circonstances exceptionnellement éprouvantes que l'on reconnaît les vrais héros. En général, toutefois, les efforts finissent par être récompensés et le héros triomphe du mal.
Mais dans Game of Thrones, les scénaristes vont plus loin: tous les personnages, sans exception, et y compris les méchants, ne semblent jamais trouver de répit. Prenons quelques exemples.
1) Tyrion, le nain, est rejeté par son père alors qu'il vient de sauver King's Landing de la ruine.
2) Sansa est rejetée par Joffroy.
3) Jon Snow qui rêve de sauver son honneur dans le Nightwatch se fait capturer par une femme.
4) Joffroy Baratheon, le roi, croit faire une bonne affaire en changeant de reine, mais il se rend compte qu'elle prend des initiatives...
5) Lady Stark est emprisonnée par son propre fils.
6) Stannis Baratheon perd la guerre.
7) Cersei se rend compte que son fils tant aimé est un incapable détesté du peuple.
8) Daenerys Targaryen perd son mari et son enfant (mais elle y gagne au moins ses dragons)
9) Les faux-frères Stark/Greyjoy se font la guerre malgré leur attachement d'enfance.
10) Arya Stak a tout perdu: sa famille, sa ville, son prof d'escrime...
On pourrait continuer longtemps. A l'exception peut-être de Lord Baelish (et de Daenerys, donc) qui tire sont épingle du jeu, tout le monde n'arrête pas de morfler.
C'est très égalitaire comme traitement: méchants comme gentils sont victimes des coups du sort, ce qui permet un attachement étonnant à des personnages a priori imbuvables. On peut furtivement se mettre à la place de Joffroy et comprendre ce qui se passe dans sa tête, ce qui rend sa folie encore plus terrifiante.
Surtout, c'est un procédé hyper efficace pour gérer cette ribambelle interminable de personnages: comment faire pour que le public ne se mêle pas les pinceaux dans tout ce monde? Simple: souffrez AVEC les personnages. Au lieu d'assister de loin à des jeux abstrait de pouvoir, on vit de l'intérieur les souffrances du vil roi et du preux chevalier. On devient les deux. Et du coup, on n'oublie rien.
Il est intéressant de constater que les personnages les plus plats sont finalement ceux qui vivent le moins de conflit: le bras droit de Daenerys (j'en oublie son nom) est un beau gosse très courageux, mais finalement pas d'un grand intérêt. Pareil pour le petit prince Stark paralysé: depuis qu'il s'est échappé de Winterfell, on se fiche pas mal de savoir ce qui lui arrive, il a perdu tout intérêt.
Bref, Game of Thrones, malgré une petite baisse de régime sur ce début de troisième saison (beaucoup d'exposition) reste d'un excellent niveau, et je vous la conseille chaudement.
Les personnages de la série courent tous derrière une chimère: pour les uns, c'est l'honneur, pour les autres, c'est le pouvoir. Même Tyrion Lannister, dont on a pu croire qu'il ne s'intéressait qu'aux plaisirs bien concrets de la chair, s'est abandonné aux jeux de pouvoir et, pire, à l'amour romantique.
Dans cette course insensée, tous les personnages font constamment face à de grosses contrariétés: malgré tous leurs plans, ils n'obtiennent jamais ce qu'ils veulent.
Bien entendu, c'est une des règles de base de la dramaturgie de contrer les plans des héros, pour mieux les mettre en situation de conflit et faire ressortir leur humanité. En effet, c'est sous des circonstances exceptionnellement éprouvantes que l'on reconnaît les vrais héros. En général, toutefois, les efforts finissent par être récompensés et le héros triomphe du mal.
Mais dans Game of Thrones, les scénaristes vont plus loin: tous les personnages, sans exception, et y compris les méchants, ne semblent jamais trouver de répit. Prenons quelques exemples.
1) Tyrion, le nain, est rejeté par son père alors qu'il vient de sauver King's Landing de la ruine.
2) Sansa est rejetée par Joffroy.
3) Jon Snow qui rêve de sauver son honneur dans le Nightwatch se fait capturer par une femme.
4) Joffroy Baratheon, le roi, croit faire une bonne affaire en changeant de reine, mais il se rend compte qu'elle prend des initiatives...
5) Lady Stark est emprisonnée par son propre fils.
6) Stannis Baratheon perd la guerre.
7) Cersei se rend compte que son fils tant aimé est un incapable détesté du peuple.
8) Daenerys Targaryen perd son mari et son enfant (mais elle y gagne au moins ses dragons)
9) Les faux-frères Stark/Greyjoy se font la guerre malgré leur attachement d'enfance.
10) Arya Stak a tout perdu: sa famille, sa ville, son prof d'escrime...
On pourrait continuer longtemps. A l'exception peut-être de Lord Baelish (et de Daenerys, donc) qui tire sont épingle du jeu, tout le monde n'arrête pas de morfler.
C'est très égalitaire comme traitement: méchants comme gentils sont victimes des coups du sort, ce qui permet un attachement étonnant à des personnages a priori imbuvables. On peut furtivement se mettre à la place de Joffroy et comprendre ce qui se passe dans sa tête, ce qui rend sa folie encore plus terrifiante.
Surtout, c'est un procédé hyper efficace pour gérer cette ribambelle interminable de personnages: comment faire pour que le public ne se mêle pas les pinceaux dans tout ce monde? Simple: souffrez AVEC les personnages. Au lieu d'assister de loin à des jeux abstrait de pouvoir, on vit de l'intérieur les souffrances du vil roi et du preux chevalier. On devient les deux. Et du coup, on n'oublie rien.
Il est intéressant de constater que les personnages les plus plats sont finalement ceux qui vivent le moins de conflit: le bras droit de Daenerys (j'en oublie son nom) est un beau gosse très courageux, mais finalement pas d'un grand intérêt. Pareil pour le petit prince Stark paralysé: depuis qu'il s'est échappé de Winterfell, on se fiche pas mal de savoir ce qui lui arrive, il a perdu tout intérêt.
Bref, Game of Thrones, malgré une petite baisse de régime sur ce début de troisième saison (beaucoup d'exposition) reste d'un excellent niveau, et je vous la conseille chaudement.
30 mars 2013
Concours de couillons
Le scénariste Antoine de Froberville pousse un coup de gueule dans le Huffington Post: les scénaristes écrivent pour gagner leur vie, pas pour passer des concours! En effet, de plus en plus de petites maisons de production tentent d'attirer le chaland en sous-traitant l'étape de l'écriture par le biais d'un concours.
Du coup, plus besoin de chercher ou d'engager un auteur: il suffit de laisser venir à soit les novices attirés par l'esprit de compétition. L'ironie, c'est que le prix pour l'heureux gagnant est dérisoire, en général bien en deçà du minimum syndical qu'un véritable scénariste est en droit d'exiger.
Ce qui pose un réel problème: si les scénaristes professionnels se font doubler par des petits jeunes sous-payés, ils meurent. Et les petits jeunes, vainqueurs du concours? Ils s'en viennent et s'en vont comme une denrée périssable. C'est la précarité pour tous.
Tout cela n'est pas nouveau.
D'ailleurs, si j'en parle, c'est uniquement parce que moi-même j'ai succombé à l'attrait des concours, il y a plusieurs années. Petit retour en arrière...
Nous sommes en 2003. J'ai 18 ans et je rêve de devenir scénariste. Mais en Belgique, à part deux écoles de cinéma (qui ne veulent pas de moi), les chemins pour y arriver semblent pour le moins sinueux. J'écrit donc "on spec" avec la naïveté et l'entrain du débutant.
Non seulement mon rythme d'écriture est très rapide (ne connaissant rien à la dramaturgie, je ne me pose aucune question) mais les premières critiques sont plutôt bonnes. J'étais à l'époque inscrit sur le site version-finale.fr (un site aujourd'hui disparu, et c'est dommage) où les visiteurs pouvaient critiquer librement tous mes scénarios. Ce n'étaient ni mes amis ni ma mère, et ils étaient pour la plupart élogieux, et à tout le moins, gentils. Je me croyais donc sur la bonne voie.
M'étant forgé la conviction que mon avenir professionnel se joue sur le terrain scénaristique, je commence à élaborer des plans de carrière. Mais, comme je le disais, en Belgique, il n'est pas question de "monter à la capitale" pour montrer son travail à un producteur: il n'y en a tout simplement pas.
Je suis à deux doigts de perdre espoir, lorsque je vois à la télévision une publicité pour un grand concours de scénario. Je soulève un sourcil. Le jury est composé de professionnels du cinéma, dont Alain Berliner, réalisateur de Ma vie en rose, un très bon film belge des années 90. Là, je soulève deux sourcils.
Lorsque, plus tard dans la journée, ils parlent du concours au journal télévisé, je suis carrément convaincu: "CinéQuest", du nom du concours, c'est une grosse machine, ils promettent de produire le scénario du gagnant, et les conditions de participation sont favorables, c'est à dire: ils veulent un "film de genre" moderne, et, mieux que tout, pour participer, c'est gratuit.
Je m'attèle donc à la tâche et j'écris un scénario fantastique, qui me semble, du haut de mes 18 ans, totalement génial. J'envoie le manuscrit et j'attends.
Bon, il se fait que je n'ai pas gagné, mais mon histoire ne s'arrête pas là. Loin de là...
Les mois passent, le gagnant est annoncé, bravo pour lui. Le projet retombe dans l'oubli. Ils sont sûrement en train de produire le fameux film promis, me dis-je ne toute naïveté.
Quelques années plus tard, alors que ce fameux concours m'est totalement sorti de l'esprit, je participe à l'écriture d'une série d'animation avec d'autres jeunes scénaristes. Nous nous sommes rencontrés via un forum internet, et notre écriture collective est très satisfaisante: l'émulation est à son comble, nous avons tous le même objectif.
Un midi, alors que nous mangeons un sandwich, nous discutons de nos parcours respectifs. "Pour ma part: pas grand chose, dis-je. J'ai vendu un petit scénario à RTL quand j'ai fait mon stage là-bas, pour une émission pour enfants..."
Un autre scénariste raconte: "Moi j'ai réalisé quelques courts métrages. Là j'ai reçu une aide à l'écriture du Fonds Flamand...."
Ok, très bien. On est plus ou moins au même niveau, pensais-je. Mais soudain, il rajoute:
"Ah oui, et aussi, il y a quelques années, j'ai gagné le concours CinéQuest."
Là, je tombe des nues! Ce scénariste débutant avec qui j'étais en train d'écrire avait eu exactement le même parcours que moi, sauf qu'il l'avait gagné, ce fameux concours! C'était lui le gagnant! Je ne l'avais pas reconnu! "Mais alors, qu'est devenu ce fameux film?" demandai-je.
L'histoire qu'il me fit des coulisses du concours fut assez calamiteuse pour le dégoûter des concours d'écriture à vie... En résumé: le promoteur du concours était un étudiant en business qui avait mis au point, avec l'argent de papa (un gros patron belge), un système fiscal avantageux pour lui, à condition de "faire du cinéma". Le fameux tax-shelter parlera peut-être à quelque-uns.
Bref, le margoulin avait réussi à réunir sous sa bannière des noms prestigieux, grâce à l'argent familial avait réussi à faire parler de son concours dans tous les médias, mais en réalité n'avait réellement l'intention de faire un film... Ou en tout cas, pas les moyens, ni logistiques ni intellectuels.
Le scénario écrit par mon camarade n'a jamais été exploité. Le concours s'es éteint de mort naturelle. Personne n'en a jamais plus parlé.
Qu'est-devenu le fameux producteur?
Il est resté producteur, de films obscurs direct-to-dvd dont personne n'a jamais entendu parlé. Il gagne probablement assez d'argent avec ses activités pour subvenir à ses besoins. En réalité, je pense qu'il n'était pas animé d'intentions mauvaises, il était juste trop incompétent. Il a surestimé ses forces. Et il a déçu pas mal de jeunes auteurs.
La morale? Dans ce genre de concours, le seul gagnant, c'est l'organisateur.
Du coup, plus besoin de chercher ou d'engager un auteur: il suffit de laisser venir à soit les novices attirés par l'esprit de compétition. L'ironie, c'est que le prix pour l'heureux gagnant est dérisoire, en général bien en deçà du minimum syndical qu'un véritable scénariste est en droit d'exiger.
Ce qui pose un réel problème: si les scénaristes professionnels se font doubler par des petits jeunes sous-payés, ils meurent. Et les petits jeunes, vainqueurs du concours? Ils s'en viennent et s'en vont comme une denrée périssable. C'est la précarité pour tous.
Tout cela n'est pas nouveau.
D'ailleurs, si j'en parle, c'est uniquement parce que moi-même j'ai succombé à l'attrait des concours, il y a plusieurs années. Petit retour en arrière...
Nous sommes en 2003. J'ai 18 ans et je rêve de devenir scénariste. Mais en Belgique, à part deux écoles de cinéma (qui ne veulent pas de moi), les chemins pour y arriver semblent pour le moins sinueux. J'écrit donc "on spec" avec la naïveté et l'entrain du débutant.
Non seulement mon rythme d'écriture est très rapide (ne connaissant rien à la dramaturgie, je ne me pose aucune question) mais les premières critiques sont plutôt bonnes. J'étais à l'époque inscrit sur le site version-finale.fr (un site aujourd'hui disparu, et c'est dommage) où les visiteurs pouvaient critiquer librement tous mes scénarios. Ce n'étaient ni mes amis ni ma mère, et ils étaient pour la plupart élogieux, et à tout le moins, gentils. Je me croyais donc sur la bonne voie.
M'étant forgé la conviction que mon avenir professionnel se joue sur le terrain scénaristique, je commence à élaborer des plans de carrière. Mais, comme je le disais, en Belgique, il n'est pas question de "monter à la capitale" pour montrer son travail à un producteur: il n'y en a tout simplement pas.
Je suis à deux doigts de perdre espoir, lorsque je vois à la télévision une publicité pour un grand concours de scénario. Je soulève un sourcil. Le jury est composé de professionnels du cinéma, dont Alain Berliner, réalisateur de Ma vie en rose, un très bon film belge des années 90. Là, je soulève deux sourcils.
Lorsque, plus tard dans la journée, ils parlent du concours au journal télévisé, je suis carrément convaincu: "CinéQuest", du nom du concours, c'est une grosse machine, ils promettent de produire le scénario du gagnant, et les conditions de participation sont favorables, c'est à dire: ils veulent un "film de genre" moderne, et, mieux que tout, pour participer, c'est gratuit.
Je m'attèle donc à la tâche et j'écris un scénario fantastique, qui me semble, du haut de mes 18 ans, totalement génial. J'envoie le manuscrit et j'attends.
Bon, il se fait que je n'ai pas gagné, mais mon histoire ne s'arrête pas là. Loin de là...
Les mois passent, le gagnant est annoncé, bravo pour lui. Le projet retombe dans l'oubli. Ils sont sûrement en train de produire le fameux film promis, me dis-je ne toute naïveté.
Quelques années plus tard, alors que ce fameux concours m'est totalement sorti de l'esprit, je participe à l'écriture d'une série d'animation avec d'autres jeunes scénaristes. Nous nous sommes rencontrés via un forum internet, et notre écriture collective est très satisfaisante: l'émulation est à son comble, nous avons tous le même objectif.
Un midi, alors que nous mangeons un sandwich, nous discutons de nos parcours respectifs. "Pour ma part: pas grand chose, dis-je. J'ai vendu un petit scénario à RTL quand j'ai fait mon stage là-bas, pour une émission pour enfants..."
Un autre scénariste raconte: "Moi j'ai réalisé quelques courts métrages. Là j'ai reçu une aide à l'écriture du Fonds Flamand...."
Ok, très bien. On est plus ou moins au même niveau, pensais-je. Mais soudain, il rajoute:
"Ah oui, et aussi, il y a quelques années, j'ai gagné le concours CinéQuest."
Là, je tombe des nues! Ce scénariste débutant avec qui j'étais en train d'écrire avait eu exactement le même parcours que moi, sauf qu'il l'avait gagné, ce fameux concours! C'était lui le gagnant! Je ne l'avais pas reconnu! "Mais alors, qu'est devenu ce fameux film?" demandai-je.
L'histoire qu'il me fit des coulisses du concours fut assez calamiteuse pour le dégoûter des concours d'écriture à vie... En résumé: le promoteur du concours était un étudiant en business qui avait mis au point, avec l'argent de papa (un gros patron belge), un système fiscal avantageux pour lui, à condition de "faire du cinéma". Le fameux tax-shelter parlera peut-être à quelque-uns.
Bref, le margoulin avait réussi à réunir sous sa bannière des noms prestigieux, grâce à l'argent familial avait réussi à faire parler de son concours dans tous les médias, mais en réalité n'avait réellement l'intention de faire un film... Ou en tout cas, pas les moyens, ni logistiques ni intellectuels.
Le scénario écrit par mon camarade n'a jamais été exploité. Le concours s'es éteint de mort naturelle. Personne n'en a jamais plus parlé.
Qu'est-devenu le fameux producteur?
Il est resté producteur, de films obscurs direct-to-dvd dont personne n'a jamais entendu parlé. Il gagne probablement assez d'argent avec ses activités pour subvenir à ses besoins. En réalité, je pense qu'il n'était pas animé d'intentions mauvaises, il était juste trop incompétent. Il a surestimé ses forces. Et il a déçu pas mal de jeunes auteurs.
La morale? Dans ce genre de concours, le seul gagnant, c'est l'organisateur.
25 mars 2013
La Femis, concurrente du CEEA
La Femis, respectable école de cinéma, lance l'année prochaine une formation sur l'écriture des séries TV: un cursus à la mode, puisque c'est exactement ce que propose déjà le CEEA. J'ai vu ici et là des réactions plus ou moins enthousiastes à cette nouvelle; voici mon avis.
Les derniers rapports officiels sur la situation des scénaristes mettaient en avant un manque de formation, surtout en ce qui concerne les séries télé. La faible qualité des séries hexagonales s'explique, d'après les rapporteurs, par l'absence de véritable formation chez les scénaristes.
Je ne partage pas entièrement cet avis (beaucoup de rock stars n'ont pas fait de solfègre) mais il est néanmoins probable qu'une multiplication des formations entraîne une multiplication des talents, ne serait-ce que statistiquement. Ce vide va donc être (un peu) comblé... Mais comment et avec quels résultats?
La première question que l'on peut se poser est: la formation va-t-elle permettre un accès réel au marché du travail? Si l'on se base sur la concurrente (CEEA), la réponse est oui. On retrouve en effet pas mal d'anciens élèves du CEEA au générique de séries TV plus ou moins respectables. Avec sa réputation, La Femis a le potentiel de faire aussi bien.
Le risque, toutefois, est de proposer une formation plus abstraite, moins en prise avec les contraintes du marché. Là où le CEEA propose pragmatiquement des stages directement dans le pool d'auteurs de Plus Belle La Vie, créant de ce fait une expérience professionnelle inestimable, La Femis ne semble pas pour le moment mettre en avant un partenariat avec les diffuseurs. Affaire à suivre...
Deuxième question: cette nouvelle formation est-elle un "coup marketing" ou un véritable cursus de qualité? On le sait, de nombreuses écoles privées proposent des filières aux titres ronflants mais au contenu pathétique, souvent à prix d'or. La Femis a au moins l'avantage de ne pas être chère: subventionnée par l'Etat, elle ne coûte qu'environ 500€ par an. Difficile de parler d'un "coup marketing" dans ces conditions, surtout qu'elle ne prendra dans son giron que 12 élèves.
La qualité du cursus déprendra beaucoup des professeurs. La Femis promet, dans son dépliant publicitaire, l'encadrement par des "professionnels de haut niveau" ainsi qu'un "show-runner américain". La précision peut faire sourire, surtout en l'absence de nom. La formation semble en effet tournée vers les USA, promettant de "faire changer les usages figés de la profession". On peut apprécier l'intention, mais on restera sceptique sur les moyens.
Enfin, soyons pragmatiques, et posons-nous la vraie question: ais-je une chance de faire partie des 12 élèves?
Si vous avez déjà un diplôme de La Femis, apparement, oui: c'est la voie royale.
Si vous avez plus de 30 ans, il faudra prouver votre expérience professionnelle dans l'écriture narrative. Exemples cités: la BD, le cinéma, etc. La Femis étudiera alors votre dossier pour vous accorder une dérogation... L'ampleur de l'expérience professionnelle requise n'est pas précisée: dois-je être un réalisateur oscarisé, ou ais-je une chance avec mes trois courts-métrages? J'ai auto-édité mon roman, suis-je disqualifié d'office?
Si vous avez moins de 30 ans, vous êtes dans les conditions, mais il serait préférable, d'après le directeur, que vous ayez "une trentaine d'années..." Auquel cas il vous faudra demander la fameuse dérogation.
Donc, en fait, non: vous n'avez aucune chance de faire partie de 12 élèves. A demi-mots, La Femis avoue que la formation est réservée aux pros. D'après ma lecture des choses, inutile de gaspiller 100€ de frais de dossier pour tenter sa chance quand on n'a pas déjà une bonne expérience professionnelle en écriture.
Par exemple, même moi qui suis journaliste depuis des années, je ne tenterais pas le coup: la barrière à l'entrée me semble beaucoup plus haute qu'au CEEA (et même si je n'y suis pas entré, j'ai vu des potes d'expérience équivalente y entrer).
On peut déjà tirer une conclusion de tout ça: cette nouvelle formation a été annoncée un peu à la va-vite, sans trop réfléchir au comment. Les conditions d'admission sont floues, les moyens mis en oeuvre très abstraits, et les ambitions affichées un peu irréalistes.
Du côté des points forts, La Femis a très bonne réputation, le cursus semble alléchant, et, je cite, la présence du fameux "show-runner américain". La première année sera probablement pour les élèves une aventure rigolote (inaugurer une filière universitaire tient toujours de la cabriole) mais où l'activité principale sera l'essuyage de plâtres. Wait and see!
Les derniers rapports officiels sur la situation des scénaristes mettaient en avant un manque de formation, surtout en ce qui concerne les séries télé. La faible qualité des séries hexagonales s'explique, d'après les rapporteurs, par l'absence de véritable formation chez les scénaristes.
Je ne partage pas entièrement cet avis (beaucoup de rock stars n'ont pas fait de solfègre) mais il est néanmoins probable qu'une multiplication des formations entraîne une multiplication des talents, ne serait-ce que statistiquement. Ce vide va donc être (un peu) comblé... Mais comment et avec quels résultats?
La première question que l'on peut se poser est: la formation va-t-elle permettre un accès réel au marché du travail? Si l'on se base sur la concurrente (CEEA), la réponse est oui. On retrouve en effet pas mal d'anciens élèves du CEEA au générique de séries TV plus ou moins respectables. Avec sa réputation, La Femis a le potentiel de faire aussi bien.
Le risque, toutefois, est de proposer une formation plus abstraite, moins en prise avec les contraintes du marché. Là où le CEEA propose pragmatiquement des stages directement dans le pool d'auteurs de Plus Belle La Vie, créant de ce fait une expérience professionnelle inestimable, La Femis ne semble pas pour le moment mettre en avant un partenariat avec les diffuseurs. Affaire à suivre...
Deuxième question: cette nouvelle formation est-elle un "coup marketing" ou un véritable cursus de qualité? On le sait, de nombreuses écoles privées proposent des filières aux titres ronflants mais au contenu pathétique, souvent à prix d'or. La Femis a au moins l'avantage de ne pas être chère: subventionnée par l'Etat, elle ne coûte qu'environ 500€ par an. Difficile de parler d'un "coup marketing" dans ces conditions, surtout qu'elle ne prendra dans son giron que 12 élèves.
La qualité du cursus déprendra beaucoup des professeurs. La Femis promet, dans son dépliant publicitaire, l'encadrement par des "professionnels de haut niveau" ainsi qu'un "show-runner américain". La précision peut faire sourire, surtout en l'absence de nom. La formation semble en effet tournée vers les USA, promettant de "faire changer les usages figés de la profession". On peut apprécier l'intention, mais on restera sceptique sur les moyens.
Enfin, soyons pragmatiques, et posons-nous la vraie question: ais-je une chance de faire partie des 12 élèves?
Si vous avez déjà un diplôme de La Femis, apparement, oui: c'est la voie royale.
Si vous avez plus de 30 ans, il faudra prouver votre expérience professionnelle dans l'écriture narrative. Exemples cités: la BD, le cinéma, etc. La Femis étudiera alors votre dossier pour vous accorder une dérogation... L'ampleur de l'expérience professionnelle requise n'est pas précisée: dois-je être un réalisateur oscarisé, ou ais-je une chance avec mes trois courts-métrages? J'ai auto-édité mon roman, suis-je disqualifié d'office?
Si vous avez moins de 30 ans, vous êtes dans les conditions, mais il serait préférable, d'après le directeur, que vous ayez "une trentaine d'années..." Auquel cas il vous faudra demander la fameuse dérogation.
Donc, en fait, non: vous n'avez aucune chance de faire partie de 12 élèves. A demi-mots, La Femis avoue que la formation est réservée aux pros. D'après ma lecture des choses, inutile de gaspiller 100€ de frais de dossier pour tenter sa chance quand on n'a pas déjà une bonne expérience professionnelle en écriture.
Par exemple, même moi qui suis journaliste depuis des années, je ne tenterais pas le coup: la barrière à l'entrée me semble beaucoup plus haute qu'au CEEA (et même si je n'y suis pas entré, j'ai vu des potes d'expérience équivalente y entrer).
On peut déjà tirer une conclusion de tout ça: cette nouvelle formation a été annoncée un peu à la va-vite, sans trop réfléchir au comment. Les conditions d'admission sont floues, les moyens mis en oeuvre très abstraits, et les ambitions affichées un peu irréalistes.
Du côté des points forts, La Femis a très bonne réputation, le cursus semble alléchant, et, je cite, la présence du fameux "show-runner américain". La première année sera probablement pour les élèves une aventure rigolote (inaugurer une filière universitaire tient toujours de la cabriole) mais où l'activité principale sera l'essuyage de plâtres. Wait and see!
22 février 2013
La figure du jour: le kakemphaton
La kakemphaton est la collision malencontreuse de mots qui, lorsqu'ils sont lus à haute voix, créent un sens nouveau, souvent ridicule ou drôle, sans intention explicite de la part de l'auteur.
L'exemple le plus célèbre vient de Corneille, qui écrit dans sa pièce Horace:
Le même Corneille était d'ailleurs coutumier du fait. Dans une tragédie, il écrit:
Les kakemphatons apparaissent souvent lorsque l'ordre des mots est bousculé pour faire rimer un vers au forceps: à force d'inverser les sonorités, on finit toujours par tomber sur un calembourt involontaire. C'est tellement amusant que je pourrais en trouver toute la journée:
L'exemple le plus célèbre vient de Corneille, qui écrit dans sa pièce Horace:
" Je suis romaine hélas, puisque mon époux l'est"A première vue, rien ne bien particulier ici. Maintenant mettez-vous à la place de la pauvre actrice qui devait réciter ce texte devant son public, et qui subissait les moqueries lorsqu'elle disait: "mon époux l'est"... "poulet"... Voilà: c'est ça, le kakemphaton!
Le même Corneille était d'ailleurs coutumier du fait. Dans une tragédie, il écrit:
"Vous me connaissez mal : la même ardeur me brûle, Et le désir s'accroît quand l'effet se recule."Provoquant l'hilarité plutôt que l'émotion ("les fesses reculent"), Corneille fut obligé de modifier son vers.
Les kakemphatons apparaissent souvent lorsque l'ordre des mots est bousculé pour faire rimer un vers au forceps: à force d'inverser les sonorités, on finit toujours par tomber sur un calembourt involontaire. C'est tellement amusant que je pourrais en trouver toute la journée:
"Il voulait leur provoquer un choc, aux las." (chocolat)
"Il y avait, par salle, six filles." (salsifis)
"Le doute m'habite." (ma bite)
"Où s'était-on perdu?" (ses tétons)Tout ça n'est pas bien malin, mais qu'est-ce que c'est rigolo!
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