07 novembre 2006

Les détails

Avec un ordinateur, l'outil le plus courant des écrivains modernes, il est possible de passer des semaines entières sans écrire une ligne de texte utile. C'est ce qui est en train de m'arriver, et ce n'est ni la première, ni la dernière fois. C'est juste extrêmement agaçant, et, comme un cercle vicieux, m'empêche de ma concentrer sur l'écriture.

Je parcours des livres de dramaturgie, des romans, des articles sur l'écriture, j'en écris... mais je n'arrive pas à poursuivre l'essentiel: mon scénario.

Ce n'est pas faute de préparation: j'ai déblayé le terrain pendant trois mois. J'ai une foule de documents préparatoires à ma disposition: des fiches de personnages, un séquencier, un traitement, un pitch, une analyse des thèmes, des enjeux, des actes.... Bref, normalement le scénario devrait s'écrire tout seul. Et là, non, je suis coincé.

Page treize, seulement.

Or, le plus frustrant, c'est que je sais exactement ce qu'il doit se passer dans la scène suivante: du début à la fin, j'ai tout prévu, tout planifié. Mais il y a une étape que j'ai sauté: les détails.

Je suis coincé par les détails. Je porte une attention considérable aux petits détails dans un scénario, car ce sont les choses qui sont les plus visibles à l'écran. Ce sont les choses qui feront la saveur du scénario.

La construction savamment orchestrée depuis des mois était bien sûr indispensable pour soutenir comme une charpente la substance du scénario: tous les petits riens qu'on a pas prévus et qui rendent pourtant le scénario unique. Ce sont les blagues, les bons mots, les dialogues, la mise en oeuvre de certains passages délicats, etc.

Or, tous ces détails, on peut difficilement tous les passer en revue avant même de commencer à écrire. On visualise le déroulement global du film, les scènes-clés. Mais pas toutes les petites scènes transitoires. Or, je refuse de les bâcler. Simplement, je dois envisager plusieurs approches et j'ai peur de m'engager dans une mauvaise voie.

Je sais qu'à force d'y réfléchir, je trouverai bien une issue à ce problème. Car c'est un pur problème mathématique: j'ai des éléments x (les personnages, les circonstances, l'action), et je dois les mettre en forme pour arriver à la scène y. Seulement il n'y a pas qu'une seule réponse possible. Contrairement aux mathématiques, le scénario accepte aussi les mauvaises réponses... A l'auteur de juger de son propre résultat.

Alors que la maîtrise globale de la structure constitue le b.a.-ba indispensable, la maîtrise des détails ne s'apprend pas, alors qu'elle est pourtant essentielle dans le ressenti global de la qualité du scénario. Les détails sont les preuves réelles du talent d'un auteur.

Heureusement, la talent, c'est le travail. Il y a donc de l'espoir.

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