19 août 2011

Seinfeld

Jerry Seinfeld passera à Paris en septembre pour une représentation exceptionnelle de sa dernière tournée. Ah! Si j'habitais dans le coin, pour sûr, j'aurais acheté un ticket! Seinfeld n'est pas vraiment connu en Europe, mais c'est un demi-dieu aux Etats-Unis. Dans les années 90, il fut le héros de la sitcom la plus rentable de l'histoire, nommée tout simplement "Seinfeld".

Depuis tout le temps que je parle des sitcoms, il était inconcevable que je ne touche pas un mot de Seinfeld, qui inspira largement "Friends" et tous les autres suiveurs.

Le pitch de la série est simple: c'est une série à propos de rien. C'est en tout cas comme ça que l'a vendue son créateur, Larry David. En fait, avec le recul, c'est une série sur les embarras du quotidien, les couacs de la vie sociale et amoureuse, les normes de la société. Mais il est vrai qu'il n'y a pas de grande ligne conductrice, contrairement aux autres séries, qui suivent en général un fil rouge.

Jerry Seinfeld joue le rôle de... Jerry Seinfled, comédien de stand-up à New-York. Il est accompagné de son meilleur ami Georges Constanza, névrosé sans emploi fixe, Kramer son voisin fou, et Elaine, son ex avec qui il reste en bons termes.

Cette petite bande va et vient sur l'écran, sans but, sinon celui de mener une existence pleine de qui-pro-quos, des one-liners bien placés, et de tics rigolos.

Avec un pitch aussi anémique, comment Seinfeld a-t-elle pu avoir autant de succès, surtout pendant près de 10 ans?

J'ai l'impression de me répéter, article après article, puisque la recette est TOUJOURS la même: LES PERSONNAGES!

Dans une sitcom, le pitch n'a AUCUNE IMPORTANCE. On peut parler de tout et n'importe quoi! L'important, non, l'essentiel, est d'avoir une bonne poignée de personnages inoubliables.

Je rappelle les ingrédients: des personnages faillibles, dotés de nombreux défauts, qui seraient invivables dans la vraie vie, mais qui, comme par magie, nous semblent tellement sympathiques à l'écran.

Et là, Seinfled frappe fort:
  • Georges Constanza (qui est le plus gâté) possède tous les défauts du monde: il est petit, chauve, au chômage, nerveux, mesquin, radin, égoïste, infidèle, hystérique, menteur, et les épithètes manquent.
  • Cosmo Kramer est un arnaqueur à la petite semaine, un séducteur de bac à sable, un pique-assiette, un opportuniste, un colérique, un débile, etc.
  • Elaine est superficielle, menteuse, instable, mesquine...
  • Jerry, censé être le roc autour duquel les autres gravitent, n'est pas sans défauts non plus: il est infidèle, râleur, fainéant, et son ego est un peu trop grand.
Avec ces 4 là, il est possible de tenir 180 épisodes sans s’essouffler!

Mais bien entendu, les personnages, ce n'est qu'une moitié de la recette. Il faut encore leur faire vivre des histoires dignes d'intérêt.

On a vu que le pitch, l'intrigue générale si on veut, n'avait pas d'importance: ça ne signifie pas que le contenu des épisodes peut se permettre d'être moins que génial. Et pour ça, il faut bien avoir quelque chose à raconter pendant les 22 minutes de chaque épisode.

Ce quelque chose, ce sont les embarras du quotidien. Les petits "rien" qui font les grands "tout". Un compliment mal placé, une coupe de cheveux mal ajustée, un pourboire mal calculé, bref: des choses tellement insignifiantes que l'on pourrait très bien ne jamais en parler.

Mais dans Seinfeld, au contraire, ces petites choses sont passées sous la loupe, gonflées, et mises sur un piédestal. Elles envahissent la vie de nos héros au point de leur pourrir l'existence. Et avec des personnages justement nevrosés et égoïste, le cocktail est explosif.

Le type d'humour dans Seinfeld est basé sur celui de Jerry Seinfeld, comique de stand-up, mais agrémenté d'éléments que seule la télévision peut amener:

1) L'observation du quotidien
Le grand classique des comiques c'est de commencer leurs phrases par: "vous avez déjà remarqué?". Seinfeld est le spécialiste en la matière. "Vous avez déjà remarqué comme tout est petit dans un avion? Petites assiettes, petits couverts, petites toilettes...", "Vous avez déjà remarqué les files d'attente au restaurant? Ca rend les gens agressifs", etc. Et bien, du stand-up à la sitcom, il n'y a qu'une étape de traduction à faire... Et l'on se retrouve avec un épisode dans un avion, un épisode dans un restaurant, etc. Il ne reste plus qu'à "milker" la situation et la faire déraper grâce au manque de savoir-vivre de nos personnages.

2) Les qui-pro-quos
En comédie, lorsqu'un personnage ment pour obtenir quelque chose, il est presque impossible que son plan fonctionne sans rencontrer au moins l'un ou l'autre qui-pro-quo. Le mensonge et la dissimulation sont deux ingrédients essentiels de la comédie. Pour rendre ces mensonges réalistes, il faut donner une bonne motivation aux personnages: attirer de jolies femmes, gagner de l'argent, éviter une raclée, etc. Le personnage de Constanza est parfait pour s'enfoncer dans des mensonges de plus en plus inextricables. Rajoutez des malentendus et l'affaire est dans le sac.

3) La fatalité
Personnages médiocres, Jerry et Georges sont opposés par leur destin: Jerry a beaucoup de chance avec les femmes, il a du succès dans sa carrière, le monde lui sourit presque naïvement. Georges, au contraire, joue de malchance et de poisse. Cette opposition fataliste entre les deux, qui n'en restent pas moins copains comme cochon, est drôle à observer,... surtout quand la poisse de Georges vient contaminer la bonne fortune de Jerry! Du coup, le destin pathétique des deux lascars est lié et nous sommes les spectateur de leur combat s'en relâche pour s'en sortir.

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